domingo, 3 de enero de 2010

La méthode scientifique selon Karl POPPER: La falsifiabilité

SOMMAIRE
SOMMAIRE.. 1

INTRODUCTION.. 2

I. KARL POPPER : INFLUENCES ET GENESE DE LA FALSIFIABILITE.. 3
I.1. Vie et œuvre. 3
I.1.1. Vie de Karl Popper. 3
I.1.2. Œuvres. 3
I.2. Influences et genèse de la pensée de Popper. 4
I.3. Dénonciation de la conception erronée de la science. 5

II. LA METHODE SCIENTIFIQUE SELON KARL POPPER : LA FALSIFIABILITE.. 6
II.1. Définition. 7
II.2. Les degrés de la falsifiabilité. 7
II.2.1. La comparaison logique. 7
II.2.2. La recherche de la forme logique. 8
II.2.3. La comparaison de la théorie ou la corroboration. 8
II.2.4. La vérisimilitude. 9

III. LA PORTEE SCIENTIFIQUE DE LA FALSIFIABILITE.. 10
III.1. Popper et l’approximation vers la vérité. 10
III.2. la falsifiabilité et le progrès scientifique. 12

IV. APPROCHE CRITIQUE DE LA FALSIFAIBILITE DE POPPER.. 15
IV.1. Intérêt philosophique. 15
IV. 2. Les limites de la falsifiabilité de Popper. 16

CONCLUSION.. 18

BIBLIOGRAPHIE.. 19



INTRODUCTION
« La raison humaine, remarque Kant, a cette destinée singulière dans une partie de ses connaissances d’être accablée de certaines questions qu’elle ne saurait éviter ».[1] L’homme qui pense, s’interroge sur tous les domaines. Cette perpétuelle interrogation l’amène aussi à se poser des questions sur l’évolution et la qualité de la connaissance objective en science. De ces investigations, il découvre que la vérité scientifique, est chez certains auteurs de philosophie, considérée comme définitivement constituée, et que chaque auteur, mets ses propres moyens en jeu pour atteindre cette vérité. Descartes y est parvenu par le truchement du cogito, Kant, par l’espace et le temps, catégories a priori de la sensibilités. Cet a priori qui appelle l’universel, appelle du même coup, l’absolu qui est le propre de la vérité définitivement établie. Avec les auteurs comme Karl Popper, Kuhn, Feyerabend, la tradition qui fait de la vérité scientifique un objet de foi, est rompu, et un nouveau règne s’ouvre. Désormais, les auteurs oeuvrent au progrès de la science, sans l’enfermer dans les carcans du dogmatisme. Ils travaillent à proposer des vérités sans cesse à construire et qui se laissent dépasser. C’est dans ce sillage que Popper supplée à la question de Kant : à quelle condition la connaissance est-elle possible ? Par cette autre : à quelle condition le progrès scientifique est-il possible ? [2]. La question qui se pose est celle de savoir si la falsifiabilité peut nous permettre d’atteindre la vérité scientifique ? Pour répondre à cette question, nous présenterons les mobiles généalogiques et pensées qui ont inspirées Popper, puis nous exposerons sa méthode, et nous ferons ressortir les intérêts de sa pensée aujourd’hui et présenterons quelques limites. Mais avant, nous ferons une brève biobibliographique de notre auteur.
I. KARL POPPER : INFLUENCES ET GENESE DE LA FALSIFIABILITE
I.1. Vie et œuvre
I.1.1. Vie de Karl Popper
Karl Raimund POPPER est né le 28 juillet 1902 à Vienne en Autriche d’une famille juive qui se convertira plus tard au protestantisme. Il démarra sa vie active comme apprenti ébéniste. En 1919, il adhère le parti communiste autrichien, mais n’y reste que très peu. Après son passage dans le parti social- démocrate autrichien, il entreprend des études universitaires tout en enseignant la physique et la mathématique dans l’enseignement secondaire. Motivé par la lecture de certains auteurs membres du Cercle de Vienne, il se met à écrire et à réfléchir sur les questions épistémologiques et en 1934, il publie une partie de ses écrits dans un ouvrage intitulé Logik der Forschung (Logique de la connaissance scientifique). A travers cette première œuvre Popper acquiert une certaine notoriété auprès des scientifiques de Vienne.
Malheureusement cette notoriété ne dure pas longtemps, car la situation socio-politique en Allemagne se dégrade progressivement ; à cause de la montée rapide des mouvements extrémistes et des visées annexionnistes de l’Allemagne. A cet effet, en 1937 il décide de s’installer en Nouvelle-Zélande où il enseigne jusqu’en 1945. Sur la demande de Hayek, il quitte la Nouvelle-Zélande et s’installe en Angleterre où il est invité à enseigner la logique et la méthode scientifique dans la « London School of Economics » de 1945 à 1966 et dans l’Université de Londres de 1949 à 1969.
A Londres Karl POPPER fait face à certaines difficultés comme l’écrit Jean BEAUDOUIN : « L’immersion n’est pas évidente et POPPER éprouve au départ bien des difficultés variante de la philosophie analytique jusqu’alors régnante en Angleterre. Il parvient cependant à imprimer sa marque et à influencer de façon durable toute une génération de philosophes britanniques »[3]. Il prend sa retraite en 1969 et vit depuis cette époque à Londres où il meurt le 17 septembre 1994.
I.1.2. Œuvres
En ce qui concerne ses oeuvres, il est à relever Karl Popper a écrit beaucoup d'ouvrages notamment :
.Les deux problèmes fondamentaux de la théorie de la connaissance (titre original : Die beiden Grundprobleme der Erkenntnistheorie, 1930-1933).
Logique de la découverte scientifique (titre original : Logik der Forschung, Logique de la recherche ; The Logic of Scientific Discovery, 1934)
Misère de l'historicisme (The Poverty of Historicism, 1944-1945)
La Société ouverte et ses ennemis (The Open Society and Its Enemies, 1945)
Conjectures et refutations (Conjectures and Refutations: The Growth of Scientific Knowledge, 1953)
La connaissance objective (Objective Knowledge: An Evolutionary Approach, 1972)
La quête inachevée (Unended Quest; An Intellectual Autobiography, 1976)
La Télévision, un danger pour la démocratie (1995)
La Leçon de ce siècle, (1993)
A Note on Verisimilitude
The Self and Its Brain: An Argument for Interactionism, (1977) [coécrit avec le neurophysiologiste John Carew Eccles].
The Open Universe: An Argument for Indeterminism, (1982)
Realism and the Aim of Science, (1982)
The Myth of the Framework: In Defence of Science and Rationality, (1994)
Knowledge and the Mind-Body Problem: In Defence of Interactionism, (1994)
Toute vie est résolution de problèmes, 2 tomes, (1997).
Un univers de propensions : deux études sur la causalité, (1992).
I.2. Influences et genèse de la pensée de Popper
D’entrée de jeu, il serait important pour nous de préciser le contexte d’émergence de l’épistémologie de Popper. En effet, s’agissant de ce contexte, nous pouvons dire qu’il a une dimension à la fois scientifique et philosophique. Du point de vue scientifique, nous sommes à l’époque de la relativité d’Einstein. Popper fut marqué par la théorie de la relativité alors que jusque- là, c’était la théorie newtonienne qui était considérée comme vraie « a priori » et acceptée comme acte de foi. La théorie einsteinienne est donc venue tout bouleverser. Ainsi, Popper va puiser l’intuition centrale de sa pensée scientifique surtout dans la logique de l’accroissement de la connaissance scientifique. Il sera marqué par trois aspects fondamentaux de la théorie d’Einstein qui ont apporté des nouvelles lumières sur sa conception de la logique de la science. D’abord, le fait que « Einstein soutient que sa théorie ne contredit que quelques aspects de la mécanique newtonienne et de fait l’englobe»[4]. Ensuite, « il ne se vante pas de mettre en place une théorie toute faite, mais considère sa théorie comme un simple pas vers une théorie ouverte à une plus large généralisation »[5]. Enfin « il ne tente aucune vérification de sa théorie et n’en recherche aucune confirmation. Bien au contraire, il en attend impatiemment une probable remise en question, une nouvelle réfutation »[6].A travers les trois aspects soulignés se dessine, de manière globale la substance de la pensée scientifique de Karl Popper. Ce dernier retiendra que, pour qu’il y ait accroissement de la connaissance, une théorie scientifique ne doit pas s’élancer dans la quête effrénée des défenseurs, mais elle doit toujours chercher à être dépassée sous peine de se muer en idéologie.
Du point de vue philosophique, il est contemporain du contexte d’empirisme, d’inductivisme et de vérificationnisme soutenu sur le plan idéologique par le Cercle de Vienne. Les membres de ce cercle s’étaient donnés pour objectif d’unifier les sciences et d’éliminer la métaphysique en partant du fait qu’ils considéraient les propositions métaphysiques comme dénuées de sens. Popper s’opposera à la philosophie de Vienne appelée empirisme logique ou néo- positivisme, en particulier en ce qui concerne la théorie de la signification d’une proposition logique et la théorie de la vérification dans les sciences. Car pour Popper, la métaphysique n’est pas dépourvue de sens. Il admet que la science prend souvent appui sur des pensées purement spéculatives et abstraites. Il avoue sans crainte que le développement de la physique atomique se rattache aux spéculations métaphysiques d’Héraclite et de Démocrite. Il sait que les théories physiques d’Einstein sont plus spéculatives qu’elles ne sont fondées sur des observations. La vérifiabilité paraît donc insuffisante au regard de Popper pour délimiter les champs de la rationalité scientifique et condamner à la perte toute métaphysique.
I.3. Dénonciation de la conception erronée de la science
L’épistémologie de Popper, comme nous l’avons signalé plus haut, s’est édifiée en réaction contre une conception dite erronée de la science véhiculée par l’idéologie néo positiviste. Les caractéristiques essentielles de cette conception sont les suivantes : au niveau de la méthode, cette conception prône une méthode inductive basée sur l’observation et l’expérimentation. D’après cette méthode, la science commence avec l’observation. Celle-ci offre des bases solides au fondement de la connaissance scientifique.
Au niveau de la valeur des théories scientifiques, cette conception considère les théories scientifiques comme des réalités vérifiées et établies une fois pour toutes. D’après en effet les néo-positivistes, lorsqu’une théorie scientifique a subi avec succès la vérification expérimentale, elle est établie comme vraie, c’es-à- dire comme inflexible, immuable et définitive. L’image de la vérité qui se dégage ici est celle d’une vérité absolue, indubitable. A ce propos, Popper dira : « la conception erronée de la science se révèle dans la soif de l’exactitude »[7].
Au niveau de l’image du fonctionnement de la science, cette conception pose que la science est une croissance de certitudes en incertitudes, l’établissement progressif des vérités. L’histoire des sciences de ce point de vue apparaît comme purement cumulative, c’est-à-dire comme accumulations des vérités définitivement constituées. Popper remet en cause cette conception dite erronée et présente la science comme une activité au sein de laquelle se déploie une révolution permanente.
Le problème fondamental en philosophie des sciences selon Popper, est celui de la démarcation. La démarcation est la question de marquer la différence entre ce qui relève de la science et ce qui ne relève pas de la science. Afin d’établir cette différence, Popper part de la dénonciation de la théorie positiviste. Ainsi, il constate que l’induction en science est basée sur l’observation du monde. Or cette observation est problématique du fait même qu’elle se relève être partielle. En tirant des conclusions à partir des démarches inductivistes ne garantit pas la vérité des conclusions. L’induction est donc invalide selon Popper.

II. LA METHODE SCIENTIFIQUE SELON KARL POPPER : LA FALSIFIABILITE
La science dans son déploiement connaît beaucoup de progrès. Depuis l’antiquité jusqu’à l’époque contemporaine dans laquelle elle devient plurielle. Pour ce qui est des théories sur l’objectivité de la connaissance scientifique, plusieurs auteurs y ont appliqués leur méthode, et vérifiant les hypothèses, sont parvenus pour beaucoup aux théories définitivement constituées. Popper par sa méthode qu’il appelle falsifiabilité ouvre une nouvelle ère. La vérité scientifique est revêtue du manteau de la meilleure théorie disponible[8]. La science ne possède pas une vérité absolue et ne fournit pas de certitude. Ainsi la connaissance scientifique ne peut être qu’hypothétique donnant de manière progressive, des vérités approximatives. La science est déductive et sa méthode procède par divers essais et erreurs. Qu’est-ce- que la falsifiabilité ? Et quelle cheminement prend- t-elle pour se réclamer comme telle ?
II.1. Définition
Falsifiabilité ou réfutabilité selon les mots de Popper, est la méthode utilisée pour établir les théories scientifiques les meilleures disponibles, non pour éliminer celles qui sont fausses comme le signifierait le lecteur peut averti. En effet pour notre auteur, la scientificité d’une théorie dépend de sa capacité à être réfutée. Elle doit pouvoir être testée. Toute théorie qui n’est pas testable et qui ne se laisse éprouver que par des exemples qui la confirment, n’est pas scientifique ; du fait que la vérifiabilité[9] n’est pas considérée comme critère de démarcation entre le vrai et le faux. Les théories doivent passer les tests les plus sévères et si malgré tout elles résistent, alors pour Popper, elles peuvent être maintenues provisoirement car elles ont fait leur preuves « c’est la raison pour laquelle la découverte d’exemples qui confirment une théorie a très peu de signification, si nous n’avons pas essayé, sans succès de découvrir des réfutations. Car si nous ne prenons pas une attitude critique, nous trouverons toujours ce que nous désirons »[10]. La falsifiabilité est donc la possibilité qu’il y a de soumettre des théories à des tests expérimentaux, capables éventuellement de les réfuter.
II.2. Les degrés de la falsifiabilité
Scrutant la méthode poppérienne, nous distinguons quatre grandes étapes différentes au cours desquelles pourraient être réalisée la mise à l’épreuve d’une théorie.
II.2.1. La comparaison logique
Popper éprouve à ce niveau la logique interne de la théorie, vérifie sa cohérence. « La condition de la cohérence joue un rôle particulier parmi les divers conditions auxquelles un système théorique (…), doit satisfaire. On peut la considérer comme première des conditions. »[11]. Cette condition revêt une importance singulière dans le processus de la démarcation. Contrairement aux systèmes incohérents qui ne fournissent aucune information, et encore moins ne font avancer la science en rien, les systèmes cohérents viennent comme en prélude à la classification des théories en vraies ou fausses ; dans la mesure où ses systèmes de par leur nature, scindent en deux toutes les théories possibles en celles qui sont contradictoires ou compatibles.[12] La cohérence se révèle ici comme la « condition la plus générale à laquelle doit satisfaire un système »[13]. Si la théorie satisfait pour elle-même aux autres principes logiques de non-contradiction, du tiers exclu, de l’identité, la première conclusion c’est que cette théorie se révèle acceptable.
II.2.2. La recherche de la forme logique
Outre la cohérence, la théorie testée doit satisfaire à une autre condition supplémentaire : celle de la scientificité. Ce test a pour objet de déterminer si la théorie a des caractéristique d’une théorie scientifique, si elle répond ou non à la l’expérimentation, si elle n’est pas tautologique ou issue d’une induction. La deuxième conclusion c’est que la théorie a provisoirement réussie son test et est maintenue. Si la décision venait à être négative, la théorie serait falsifiée. A ce propos, Popper dit que si une théorie « se révèle vérifiée, la théorie a provisoirement réussie son test (…) mais si la décision a été falsifiée, cette falsification falsifie également la théorie dont elle a été logiquement déduite. Il faudrait noter ici qu’une décision positive ne peut soutenir la théorie que pour un temps, car des décisions négatives peuvent toujours l’éliminer ultérieurement »[14].
II.2.3. La comparaison de la théorie ou la corroboration
La logique inductive pour laquelle Popper s’érige contre, a travaillé à développer les attributs de vérités et faussetés pour les théories. A cette conception, supplée la logique de la probabilité ou des degrés de la probabilité se référant toujours aux vérités apodictiques de vrai et faux. Or la probabilité semble ne pas être appropriée ; parce qu’elle n’apporte aucune nouveauté à la science elle ne fait que vérifier les données préétablies. « Les théories ne sont pas vérifiables mais elles peuvent être corroborées »[15]. Popper utilise ce mot corroboré pour exprimer le degré auquel une hypothèse a résisté à des tests sévères, et ainsi a fait ses preuves. La théorie éprouvée est mise en confrontation avec les autres théories, ou avec le résultat des observations expérimentales, dans le but de déterminer si elle constituerait un progrès scientifique. Au cas où elle survie à ces tests systématique et rigoureux, nous pouvons tirer la troisième conclusion que la théorie est corroborée « on considère que l’accord corrobore l’hypothèse sans être preuve définitive »[16]
II.2.4. La vérisimilitude
Popper cherche encore des moyens de réfuter la théorie déjà éprouvée. Si jusqu’ici, celle-ci résiste au test, et qu’une autre ne la remplace pas avantageusement dans le déploiement de la science, Popper n’affirme pas sa vérité absolue comme ses devanciers, « nous ne savons pas, nous ne pouvons que conjecturer »[17]. Ces conjectures prennent le sens d’anticipation ou d’hypothèse qui doivent passer par des tests non pour les confirmer, encore moins pour prouver la raison de sa falsifiabilité, mais pour essayer de la détruire afin de déclarer sa résistance. La théorie corroborée n’est pas déjà vrai, d’ailleurs, la corroboration « ne peut aller de pair avec les concepts vrai et faux »[18] lesquels sont intemporels. Une théorie corroborée est temporelle et accepte indifféremment plusieurs autres théories au même moment, ou non qui réponde à elle ou la valide. « Pour un seul et même énoncé, il peut y avoir n’importe quelle nombre de valeur de corroboration différente et toutes peuvent être « exactes » en même temps. Car il ne s’agit pas de valeurs qui peuvent découler logiquement de la théorie et des divers moments »[19]. Ainsi, pour Popper, les théories, loin d’être vraies ou définitivement établit, peuvent prétendre à la vérisimilitude ; c’est-à-dire, qu’elle est plus proche du vrai. Si la théorie « a résisté à tout ses tests, alors, nous pouvons avoir de bonnes raisons de conjecturer que notre théorie -qui comme nous le savons, a un plus grand contenu de vérité que la précédente – pourrait ne pas avoir un plus grand contenu de fausseté »[20]. La théorie se trouve être la meilleure disponible, fondée sur le fait qu’on peut toujours montrer qu’une autre théorie non encore réfutée est bonne qu’elle. D’ailleurs, ce qui devrait définir l’homme des sciences, doit être la quête et non la possession de la vérité. « Ce qui fait l’homme des sciences ce n’est pas la possession de connaissances, d’irréfutables vérités, mais la quête obstinée et audacieusement critique de la vérité »[21].
III. LA PORTEE SCIENTIFIQUE DE LA FALSIFIABILITE
III.1. Popper et l’approximation vers la vérité
Après avoir dénoncé l’image de la science faussement vulgarisée par le néo-positivisme, Popper nous présente l’image réelle de la science, qui est celle d’une activité au sein de laquelle se déploie une révolution permanente, qui est celle d’une « quête obstinée et audacieusement critique de la vérité ».[22]
En effet, la science emprunte désormais une démarche hypothético-déductive. Cette méthode met l’accent sur l’activité conjecturale et non sur les énoncés d’observation. D’après elle, la science commence par des conjectures audacieuses à travers lesquelles le savant cherche à sonder l’univers, à contraindre la nature à lui révéler ses secrets. Ces conjectures ou hypothèses sont soumises à l’épreuve des tests expérimentaux rigoureux et sévères. Celles qui ne surmontent pas l’épreuve doivent être réfutées et remplacées par d’autres, de sorte que ne survivent que celles qui s’avèrent être plus performantes. Popper dit à cet effet : « (…) la connaissance opère par conjectures et réfutations ».[23]
Ainsi, la conception poppérienne de la science considère les théories scientifiques comme des vérités provisoires, hypothétiques. Les théories scientifiques ne sont jamais définitivement établies, car elles ne sont que des approximations provisoires de la vérité. Lorsqu’une théorie a victorieusement surmonté l’épreuve de test, elle est provisoirement vraie. Dans cette perspective, Popper fait remarquer que « toutes les lois, toutes les théories demeurent, par leur nature même, provisoire, conjecturales ou hypothétiques, même lorsque nous nous estimons impuissant à les mettre plus longtemps en question »[24].
De ce fait, la science ne considère ses lois et ses théories que comme des énoncés provisoires qui seront tôt ou tard remplacés par des meilleurs. Ces lois et ces théories sont toujours ouvertes à la discussion. Ainsi, on peut dire que la certitude à laquelle accède la science est une certitude ouverte, une certitude en devenir. La vérité en science est toujours provisoire, relative à l’état d’avancement de la recherche. En science, selon Popper, il n’y a pas de vérité absolue, c’est-à-dire de vérité inflexible, définitive ; une telle vérité correspondrait à la déchéance de l’esprit, à l’arrêt de la pensée, de la recherche. Popper écarte ainsi de la science ce qu’il nomme : « La soif d’exactitude »[25], « le vieil idéal scientifique de l’épistèmê, l’idéal d’une connaissance absolument certaine et démontrable »[26]. C’est dans ce sens qu’il écrit :
« La science n’est pas un système d’énoncés certains ou bien établis, non plus qu’un système progressant régulièrement vers un état final. Notre science n’est pas une connaissance (épistèmê). Elle ne peut jamais prétendre avoir atteint la vérité ni même l’un de ses substituts telle la probabilité »[27]
Ainsi, pour Popper, la science ne possède pas la vérité ; elle est plutôt dans le provisoire. La science ne procure que la « vérisimilarité » ou la « vérisimilitude »[28]. L’image de la science qui découle de cette conception de son fonctionnement est, d’après Popper, celle d’une activité en mutation perpétuelle, en révolution permanente. Par le caractère éphémère de ses théories, de ses lois, la science est en mouvement perpétuel. La science n’est pas un système clos, un ensemble d’énoncés, de propositions considérés une fois pour toute, un ensemble de vérités dernières, mais une recherche ouverte et inachevable, une réalité en perpétuel devenir, une approximation sans cesse renouvelée de la vérité. Popper écrit à ce propos : « La conception erronée de la science se révèle dans la soif d’exactitude. Car ce qui fait l’homme de science, ce n’est pas la possession de connaissances, d’irréfutables vérités, mais la quête obstinée et audacieusement critique de la vérité »[29].

III.2. la falsifiabilité et le progrès scientifique
Selon Popper, pour que la science progresse, il ne faut pas choisir des théories qui échappent à la menace de la falsification, et dont on ne pourrait jamais découvrir l'éventuelle fausseté. Car pour lui, le progrès scientifique est conçu comme un processus qui mène les hypothèses spéculatives, à leur critique et à leur falsification éventuelle, puis à des problèmes nouveaux. C’est pourquoi, il faut toujours choisir, entre plus de théories non la plus sûre ou la plus probable, mais la plus audacieuse, la plus riche, la plus improbable, c'est-à-dire la plus falsifiable: cela parce qu'elle peut nous apprendre davantage, qu'elle réussisse ou qu'elle échoue, car la science évolue par essais et par erreurs, par conjectures et réfutations. Ensuite, il ne faut pas protéger coûte que coûte nos théories, mais au contraire, les soumettre à la critique la plus sévère, en nous rappelant que même une réfutation est un succès. A cet effet pour Popper, aucune théorie ne peut être considérée comme établie, même quand elle a passé avec succès beaucoup de tests, elle n'est jamais qu'une hypothèse, toujours susceptible d'être remise en question. En effet:
" La science n'est pas la possession de la vérité, mais sa recherche: ce qu'il y a de rationnel dans la connaissance réside uniquement dans son caractère dynamique, c'est-à-dire dans sa possibilité de croître. Cette croissance est en droit indéfinie; si elle s'arrêtait un jour, ce ne serait pas parce que la vérité définitive serait atteinte, ce qui n'a pas de sens, mais parce que la méthode critique serait abandonnée"[30].
Par ailleurs, pour que la science puisse progresser, Karl Popper reconnaît qu'il ne lui faut pas seulement des réfutations, mais aussi des succès positifs. C’est la raison pour laquelle il faut d'une part que la théorie fournisse des prévisions nouvelles effectivement vérifiées. D'autre part, qu'elle ne doit pas être souhaitée simplement parce que ce succès semble d'emblée ce que nous cherchons, car sans lui, la science perd son caractère scientifique. Popper reconnaît aussi qu'il est légitime que le savant puisse défendre les théories qu'il émet contre les attaques trop faciles, même si son but essentiel est de chercher à les tester sévèrement.
En outre, la démarcation poppérienne engendre une méthode capable d'épurer la théorie, soit en l'invalidant ou en la réfutant, soit en la testant. La théorie est jugée efficace (scientifique) ou non à cause des erreurs qu'on peut y déceler. Cependant, celle qui est efficace est provisoire car elle devra toujours passer au crible de la démarche critique tandis que celle qui est réfutée n'est pas rejetée mais récupérée dans le souci que ses erreurs servent à la rendre utile. Ainsi, grâce aux erreurs, la connaissance et la science avancent car :
"La connaissance, et la connaissance scientifique tout particulièrement, progresse grâce à des anticipations non justifiées (et impossible à justifier), elle devine, elle essaie des solutions, elle forme des conjectures. Celles-ci sont soumises au contrôle de la critique, c'est- à -dire à des tentatives de réfutations qui comportent des tests d'une capacité critique élevée"[31].
C'est pourquoi pour Popper, puisque l’évolution permanente de la science ne saurait la réduire à un caractère fixiste, il est donc important de se rappeler que "le progrès scientifique, parce qu'il est un processus d'innovations, ne peut avoir lieu que dans univers ou l'avenir est ouvert, un univers non déterministe, ou irrésolu"[32]. La démarche critique est la méthode scientifique qui consiste à être prêt à modifier les lois et les schémas que l'on a forgés, à les soumettre à l'épreuve des tests, à les réfuter et à en établir la fausseté. Cette démarche peut être assimilée à la démarche scientifique, n'est nullement inductive, elle est au contraire "hypothético- déductive" en opposition partielle à l'attitude dogmatique qui négligerait ce qui viendrait réfuter des lois déjà établies. Opposition partielle car elle s'oppose à la démarche dogmatique. La critique dont il est question ne rejette pas les croyances dogmatiques qui existent, mais les examine. Ce sont des croyances et des théories que nous avons trouvées dans l'histoire de la science auxquelles nous adhérons sans jugement, mais de manière plus ou moins dogmatique. Ces croyances dogmatiques sont ce que nous pouvons appeler les mythes. La science ne dispose pas d'un autre moyen pour progresser, elle doit prendre son point de départ à partir de ce qui existe déjà. Les mythes que constituent les lois et les croyances anciennes doivent être soumis à un examen critique. Car pour Popper c'est à travers une critique rigoureuse que la science peut espérer survivre.
III.3. La falsifiabilité comme exigence de coopération scientifique
Un énoncé ou une théorie scientifique est réfutable si et seulement s’il est logiquement incompatible avec au moins un énoncé de base. En effet, l’énoncé scientifique ne doit pas se fonder sur des simples observations comme dans l’induction. La démarche à suivre doit être hypothético-déductive de sorte que n’importe quel énoncé, formulé de manière conjecturale, se soumettre à l’épreuve de l’expérimentation. Ce test est indispensable du fait que les théories scientifiques portent sur l’avenir, alors que l’expérience quant à elle est temporelle. Ceci veut dire que la validité d’une théorie dépend de sa capacité à résister aux nouveaux cas qui se présentent dans l’avenir ; pendant que l’expérience qui permet l’élaboration d’une théorie change selon les circonstances (les cas qui ne peuvent se répéter par exemple) et les contextes.
Par ailleurs, le progrès scientifique montre qu’une théorie considérée comme vraie aujourd’hui peut s’avérer fausse demain. Ceci soulève donc le problème de vérité. Comment comprendre que la science qui vise la vérité ne puisse pas l’atteindre de manière définitive? Karl Popper affirme à cet effet : « Bien que la science ne puisse pas atteindre la vérité, ni la probabilité, son effort pour atteindre la connaissance, sa quête de la vérité est encore le motif le plus puissant de découvert scientifique »[33]. Ainsi nous ne savons pas mais nous conjecturons. Or, c’est justement cette conjecture qui autorise tout refus d’obscurantisme, de monopole, d’oubli de concurrence d’idées. La science, en tant qu’idéal, n’a pas de frontière. C’est ici où il importe, au nom de la falsifiabilité, de souligner l’exigence de la coopération ou de la collaboration scientifique pour que tout le monde contribue, à sa façon et dans son contexte socioculturel, à ce progrès scientifique auquel aspire l’humanité tout entière. Si la falsifiabilité permet à une théorie de s’ouvrir aux tests d’autres expériences de celles qui l’ont fait naître, c’est que la science ne refuse pas l’apport de tout le monde. La corroboration elle-même en résulte.
En outre, si la mondialisation était saine, elle constituerait ce milieu privilégié pour cette coopération scientifique parce qu’elle permettrait non seulement des prouesses scientifiques inédites mais aussi à certains de mettre leur génie au service de la science. Ainsi le transfère des technologies trouve sa raison d’être dans la mesure où il épargnerait beaucoup de peuples à ne consommer que ce que produisent les autres mais, à contribuer de manière significative au développement de leurs pays et du monde. Ceci suppose également une volonté de la part de ceux qui sont plus avancés dans les recherches scientifiques de faire accéder tout le monde à cette science. Néanmoins que cette coopération scientifique soit accompagnée d’une éthique pour que certains dirigeants n’orientent pas les découvertes scientifiques vers la destruction de l’humanité. Ainsi, à partir de la falsifiabilité de Popper, il y a lieu de concevoir une possibilité de coopération scientifique pour que tout le monde contribue à sa façon et dans son contexte socioculturel, au progrès scientifique. Nous pensons que le monde sera moins humain si certaines personnes détournent la science de son idéal premier, la quête de la vérité. Car Le mystère de la science doit aider à découvrir le fondement de l’existence humaine et celui-ci n’est pas l’affaire d’une minorité, mais de tous.
IV. APPROCHE CRITIQUE DE LA FALSIFAIBILITE DE POPPER
IV.1. Intérêt philosophique
L’une des caractéristiques de la pensée de Popper est l’immense portée de son influence intellectuelle, car après la découverte de son épistémologie, il a été apprécié par de nombreux scientifiques comme rarement les philosophes l’ont été avant lui. En effet, l’originalité de sa pensée résulte du fait qu’à la différence de Francis Bacon et des néo-positivistes, il propose la théorie de la falsifiabilité comme critère de scientificité. Ce qui le conduit à admettre, que plus une hypothèse est générale et précise, plus elle exclut des états de choses possibles, plus son degré de falsifiabilité est grand. La falsifiabilité est à cet effet une attitude scientifique qui donne lieu à l’avènement d’une vérité scientifique toujours plus vraie. De ce fait, Popper a ainsi insinué à la science un caractère de tolérance, refusant à tout prix le dogmatisme même de ses propres lois. Ainsi, à travers la falsifiabilité, la science acquiert un caractère progressif voire dynamique, car elle n’est plus conçue comme une vérité statique ou close, mais plutôt comme une évolution permanente.
De plus, la pensée de Popper se précise aussi sur le fait qu'il ait apporté la lumière sur le problème fondamental en philosophie des sciences à savoir la démarcation qui est la question de la distinction entre ce qui relève de la science ou de la métaphysique. En effet,, le célèbre critère de démarcation proposé par Karl Popper, provient de son invalidation de la doctrine de l'induction, qui se caractérise par une solution au problème de l'induction, laquelle consiste à démontrer, qu'il n'y a tout simplement pas d'induction, ou que l'induction n'est qu'un mythe. De ce fait, Popper pense qu'aucune loi scientifique n'a jamais pu être édifiée par une procédure inductive, et qu'une telle croyance repose toute entière sur une version erronée de la théorie de la connaissance s'apparentant à celle du sens commun. Il soutient, de façon répétée, qu'il n'y a pas d'induction à proprement parler, puisque toute observation est précédée par une théorie générale et sélective, et parce que toute justification d'un principe d'induction sombre irrémédiablement dans la régression à l'infini.
Il est également à préciser que Karl Popper adoptera une position plus nuancée vis-à-vis du statut de la métaphysique dans les sciences empiriques. En effet, il était d'accord, dans l'absolu, avec l'idée que l'une des tâches importantes de toute science empirique était de remplacer progressivement ses énoncés métaphysiques par des lois universelles corroborées par des tests empiriques, et accordait une certaine valeur à la métaphysique arguant du fait que l'histoire des sciences empiriques montrerait qu'elles sont « presque toujours sorties du giron de la métaphysique et que le point de vue selon lequel la métaphysique devrait être éliminée comme « non scientifique» est lui-même expressément contesté par de nombreux représentants de ces sciences »[34].

IV. 2. Les limites de la falsifiabilité de Popper
La théorie de la falsifiabilité de Popper, même si elle a enrichi la science par sa vision dynamique du progrès scientifique, soulève tout de même quelques difficultés. En effet l’approche poppérienne n’offre que peu de certitudes, car la proximité de la vérité scientifique reste encore problématique. C’est ce qui fait dire à Larry Laudans que « nous n’avons, apparemment aucun moyen de savoir aves assurance(ou même confiance) que la science est vraie ou probable ou qu’elle se rapproche de la vérité. Ces buts-là sont utopiques, au sens littéral du mot ; nous ne pouvons jamais savoir si nous les atteignons »[35]. De plus, Popper n’a jamais voulu que ce qu’il appelle « corroboration » tienne lieu de confirmation. Ce qui nous met dans l’étrange situation dans laquelle on peut déclarer invalides des théories, sans ne jamais en déclarer aucune qui soit valide. C’est pourquoi Chalmers souligne que « si on réussit à falsifier les théories au moyen d’un argument adapté, on ne parviendra jamais à établir leur vérité ni même une quelconque probabilité de vérité. Accepter une théorie se fait toujours avec un certain degré d’incertitude »[36]. Dans le même ordre d’idées, il est aussi à noter que « ce qui affaiblit le point de vue falsificationiste tient précisément au fait que les énoncés d’observation sont faillibles et que leur acceptation ne peut avoir lieu qu’à titre d’essai et qu’elle est sujette à révision. Les théories ne peuvent être falsifiées de façon convaincante parce que les énoncés d’observation qui forment la base de la falsification peuvent eux-mêmes se révéler faux à la lumière de développements ultérieurs »[37].De plus, il y a des tentatives de réfutation qui échouent ; donc il n’y a pas de falsifications qui soient certaines.
Mais ce qui est très grave selon Sokal et Bricmont, « c’est l’obnubilation de Popper à l’égard de la vérification ou de la confirmation : du point de vue de Popper il reste que le critère de démarcation entre une hypothèse scientifique et une pseudo-hypothèse est bel et bien constitué par la réfutabilité et donc la falsification, et non par la vérifiabilité ni la confirmabilité »[38]. Ainsi, le fait que la dite réfutation ignore toute possibilité de confirmation est un cas très particulier et très grave pour l’avenir de la science. De même encore, Popper fait une distinction difficile à comprendre entre le critère de falsifiabilité pour le caractère empirique d’un système d’énoncés et les règles de la falsification. On voit que ce qui joue à la place de l’induction, ce sont pour Popper des indices de « vérisimilitude », un concept se rapportant à la comparaison entre les théories. Alors même qu’il est question chez Popper d’une approche de la vérité ou encore d’indices de « vérisimilitude », les concepts de Vrai et de Faux n’ont pas cours dans son épistémologie ni vraisemblablement dans sa logique ce qui laisse croire que celle-ci serait alors une logique sans vrai ni faux. D’ailleurs, explicitement, Popper affirme qu’on n’a pas besoin de dire qu’une théorie est « fausse » : « Il n’est pas nécessaire de dire que la théorie est ‘fausse’ ; nous pouvons dire qu’elle est en contradiction avec un certain ensemble d’énoncés de base acceptés »[39].
Par ailleurs, la conception de Kuhn vient également battre en brèche la théorie de la falsifiabilité poppérienne. En effet, Kuhn ne considère pas la victoire d’un paradigme sur un autre comme une meilleure approximation de la vérité, car chaque paradigme posant ses propres problèmes, on ne peut pas comparer leur efficacité pour le résoudre[40]. Ainsi, la science varie serait selon lui ce que croient les grands chercheurs et les grands savants d’une époque. Dans le même sillage, Feyerabend récuse l’idée poppérienne qu’il n’existe pas de développements important sans réfutation ou mieux, les développements les plus importants surviennent grâce aux réfutations. En effet, d’après Feyerabend, la science n’évolue pas suivant une démarche linéaire et cohérente dans laquelle une théorie plus performante en remplace une autre moins performante. Il dit à propos : « L’histoire de la science ne se présente pas comme une suite de conjectures et de réfutations »[41]. C’est donc dire avec lui que la falsifiabilité de Popper donne un statut précaire à la science et expose celle-ci à tout vent de critiques.
CONCLUSION
En définitive, il nous incombait de présenter le bien fondé de la falsifiabilité dans le déploiement de l’objectivité de la vérité scientifique chez Karl R. Popper. Il sied donc de rappeler que notre réflexion a porté sur une remise en cause avec Popper de la conception dite erronée de la science, véhiculée par le courant de pensée néo-positiviste du Cercle de Vienne dont il a reçu beaucoup d’influence au préalable. Ce courant prônait en effet, la méthode inductive, basée sur l’observation et l’expérimentation, d’où sa considération des théories scientifiques comme inflexibles et définitivement constituées. La conception de la vérité qui se dégageait, était absolue, certaine, voire indubitable.
Ensuite, Popper nous a également présenté sa vision de la science, à savoir celle d’une activité en révolution permanente, d’une quête sans cesse renouvelée de la vérité. La science emprunte ainsi une démarche hypothético-déductive, celle des conjectures et réfutations. Cette méthode poppérienne de la science fait de la théorie scientifique, une vérité conjecturale, provisoire ou encore une approximation de la vérité. Dès lors la connaissance scientifique cesse d’être une vérité définitive et certaine, car la falsifiabilité est pour lui une force génératrice du progrès dans la science. La science évolue non seulement par essais et erreurs, par conjectures et réfutations, mais aussi et surtout par l’apport de tous pour une corroboration qui donne lieu à une exigence de coopération scientifique. Au nom de la falsifiabilité, la science ne tolère plus le monopole d’idées.
Toutefois, bien que cette approche de l’épistémologie poppérienne soit si fructueuse, nous n’avons pas manqué d’en déceler quelques limites en nous appuyant sur des auteurs tels que Sokal, Bricmont, Larry Kuhn et Feyerabend qui reprochent à Popper d’avoir donné à la science un caractère provisoire voire incertain qui l’entrainerait à une régression dans la quête de la vérité scientifique. Mais, cela n’empêche pas de reconnaître que Popper a apporté une originalité dans la science. Car, en suggérant la méthode des conjectures et réfutations, Popper rétablit l’activité théorique dans le processus d’acquisition ou d’édification de la connaissance scientifique et de son empirisme anti-inductiviste font de lui un des piliers de l’épistémologie contemporaine.




BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES DE L’AUTEUR
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Conjectures et réfutations. La croissance du savoir scientifique, trad. Michelle Irène et Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1985.
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AUTRES OUVRAGES
CHALMERS ALAN F., Qu’est-ce que la science ? Récents développements en philosophie des sciences : Popper, Kuhn, Lakatos, Feyerabend, trad. Michel Biezunski, Paris, La Découverte, 1987.
BOUVERESSE R., Karl Popper ou le rationalisme critique, Paris, Vrin, 1998.
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SOKAL & BRICMONT, Impostures intellectuelles, Paris, Le livre de poche, 1999.
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[1]E. KANT., cité par Georges Pascal, Mémento de philosophie, coll. Initiation philosophique, Paris, P.U.F., 1967, p.184.
[2]L. C. MBARGA., Cours histoire et philosophie des sciences, université catholique d’Afrique centrale, institut catholique Yaoundé, 2008, inédit
[3] J. BEAUDOUIN, Karl Popper, Paris, P.U.F., 1989, pp. 3-4.
[4]K. MENANGA, « Le cheminement philosophique de Karl Popper », in Raison Ardente (2001) N° 62, p.9.
[5] Idem
[6] Ibid.
[7] Ibid., p.14.
[8] Cf. A. F. CHALMERS, Qu’est- ce -que la science ? Popper, Kuhn, Lakatos, Feyerabend, trad. M. Biezunski, Paris, La découverte, 1987, p. 73.
[9] K. POPPER, La logique de la découverte scientifique, trad. N. T. Rutten et P. Devaux, Paris, Payot, 1973, p. 37.
[10] K. POPPER, Misère de l’historicisme, trad. Rousseau, révisé par R. Bouveresse, Paris, Plon, 1945, p. 165.
[11] K. POPPER, La logique de la découverte scientifique, Op. cit., p. 90.
[12] Ibid.
[13] Ibid.
[14] Ibid., p.29.
[15] Ibid., p. 281.
[16] K. POPPER, Misère de l’historicisme, Op. cit., p. 165.
[17] K. POPPER, La logique de la découverte scientifique, Op. cit., p. 284.
[18] Ibid., p.281.
[19] Ibid.
[20] K. POPPER, La connaissance objective, Bruxelles, Complexe, 1985(3ième éd.), p. 93.
[21] K. POPPER, La logique de la découverte scientifique, Op. cit., p. 287.
[22] Ibid., p. 287.
[23] K. POPPER, Conjecture et réfutations. La croissance du savoir scientifique, trad. Michel Irène et Marc B. de Launay, Paris, Payot, 1985, p. 230.
[24] Ibid., p.87.
[25] K. POPPER, Op. cit., p.287.
[26] Ibid., p.286.
[27] Ibid., p. 284.
[28] K. POPPER, La connaissance objective, Op. cit., p. 147.
[29] K. POPPER, Op.cit., p. 287.
[30] R. BOUVERESSE, Karl Popper ou le rationalisme critique, Paris, Vrin, 1998, p.11.
[31]E. ADIAKA, « Popper et le progrès scientifique », in Raison Ardente, Op.cit. P.43.
[32] K. POPPER, La connaissance objective, Op. Cit. p.15.
[33]E. ADIAKA, « Popper et le progrès scientifique », Op.cit. P.43.
[34] K. POPPER, Les deux problèmes fondamentaux de la théorie de la connaissance, Paris, Hermann, 1999, p.27.
[35] L. LAUDAN, La dynamique de la science, Bruxelles, Pierre Mardaga, 1977, p.136.
[36] A. F. CHALMERS, Op. cit., p.106.
[37] Ibid., p.112.
[38] SOKAL &BRICMONT, Impostures intellectuelles, Paris, Le livre de poche, 1999, p.91.
[39] K. POPPER, Op.cit., p.281.
[40] Cf. T. S. KUHN, La structure des évolutions scientifiques, Paris, Flammarion, 1983, p.239.
[41] P. FEYERABEND, Contre la méthode. Esquisse d’une théorie anarchique de la connaissance, Paris, Seuil, 1975, p.167.

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