domingo, 3 de enero de 2010

La DSE: La famille.

MUNYANZIZA Pierre Célestin
UNIVERSITE CATHOLIQUE D’AFRIQUE CENTRALE
INSTITUT CATHOLIQUE DE YAOUNDE
FACULTE DE PHILOSOPHIE
(LICENCE III-Option de l'Education)

EXPOSE DE LA DOCTRINE SOCIALE DE L’EGLISE
LE TRAVAIL HUMAIN
DOCTRINE SOCIALE DE L’EGLISE
EXPOSE SUR LA FAMILLE

TABLE DES SIGNES ET ABREVIATIONS
C.D.S.E Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise
D.H : Dignitatem humanae
F.C : Familiaris Consortio
Gn : Genèse
G.S : Gaudium et Spes
Lev : Lévitique
L.F : Lettre aux Familles
S.E. : Synode des Evêque
M.M. : Mater et Magistra
C.E.C. : Catéchisme de l’Eglise Catholique
O.N.U. : Organisation des Nations Unis

« A notre époque, la famille, comme les autres institutions, et peut-être plus qu’elle, a été atteinte par les transformations larges, profondes et rapides de la société » (F.C.n°1)[1]. Ainsi s’ouvre l’Exhortation Apostolique sur la famille, Familiaris Consortio, du pape Jean-Paul II. En effet, le constat du pape se vérifie dans nos sociétés actuelles conformément aux réalités et aux nouvelles valeurs véhiculées par l’humanité. Si, d’après Carbonnier, « la famille est un groupe élémentaire formé d’individus que relient entre eux des faits d’ordre biologique : Union des sexes, procréation, descendance d’un procréateur commun »[1], de la part de l’Eglise, on peut parler de la famille comme étant une communauté de vie et d’amour, le sanctuaire de la foi et même l’Eglise domestique. Or, compte tenu des mutations socioculturelles de nos jours, la famille a du mal à avoir un visage rayonnant et à assumer ses responsabilités concernant sa progéniture. D’un autre coté, la société, comme partenaire de la famille, n’arrive pas, dans la plus part des cas, à l’aider à mieux se structurer et à mieux fonctionner ; quand elle n’en constitue pas simplement un obstacle. Etant donné que la famille est le cadre par excellence pour le développement intégral de l’être humain, comment la protéger contre les mutations de la société actuelle ? Quelles sont les responsabilités de la famille à l’égard de la société et vis versa ? Quelle interpellation de l’Eglise en tant que Mater et Magistra à l’égard de la famille et de la société ? Notre travail s’articulera autour de trois grands points : d’abord, nous verrons les fondements de la famille sur le plan biblique, magistériel et social; ensuite, nous tablerons sur les rapports entre la famille et la société à travers l’impact de l’un sur l’autre et vis versa ; enfin, nous ferons une analyse et une évaluation en jetant un regard critique sur la société et la famille aujourd’hui.
I. FONDEMENTS DE LA FAMILLE
La famille est un groupe social. C’est l’ensemble des familles qui forme la société. De nos jours, la famille désigne un groupe social formé du père, de la mère et des enfants. Mais qu’est-ce qui la fonde réellement ?
I.1. Conception biblique
Dès la création du monde, la famille existait déjà. Car Dieu, après avoir crée l’homme a trouvé qu’il n’était pas bon qu’il soit seul. Pour cela, il a créé la femme pour lui être une aide assortie. La femme est tirée de l’homme, « c’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme et ils deviendront une seule chair. » (Gn 2 : 18 – 24). Si tel est le cas, nous pouvons dire que l’idée de couple existait depuis la création à travers Adam et Eve. Dès lors, chaque fois qu’un homme s’unit à une femme selon la volonté de Dieu, c’est déjà une famille qui se fonde. C’est dans ce sens que Jean Chabot affirme que « la famille est une institution voulue par Dieu lui-même »[1]. C’est pourquoi Dieu, en tant qu’auteur du mariage, fonde la famille sur l’amour et sur la communion.
Ce fondement biblique de la famille sous-tend le regard de l’Eglise catholique sur le mariage, puisque c’est ce dernier qui produit la famille. Le mariage aux yeux de l’Eglise est un mystère, un sacrement, une source de force et de lumière divine. Le mariage n’est donc pas une aventure. Il est sacré. C’est dans cette perspective que Delayé affirme que : « Le mariage religieux est un sacrement qui reflète l’amour réciproque de Jésus Christ et de l’humanité ; un amour éternel et divin »[1]. Voilà pourquoi l’Eglise exige que le mariage soit indissoluble. Elle considère le divorce, la polygamie et l’infidélité comme étant des éléments de nature à causer le désordre aussi bien dans la famille que dans la société. Dès lors, on ne saurait se satisfaire du seul mariage civil qui, d’après Daujat, « est un mariage incomplet, qui est dépourvu de tout caractère religieux »[1].
I. 2. Conception du magistère
D’après l’Eglise, la famille est l’expression première et fondamentale de toute vie humaine. Elle est aussi le fondement de toute société. Dans sa lettre aux familles, le Pape Jean-Paul II montre l’importance de la famille pour tout homme, et précise que « personne n’a le droit d’y échapper car en cas de manque l’homme n’est plus un être socialement reconnu par les sociétés humaines » (L.F.n°2). Le magistère met à la base de la famille, l’union de l’homme et de la femme. Cette union est avant tout un contrant, mais « le contrant qui unit les époux n’est pas un consensus provisoire, il est bien plus un consentement personnel et irrévocable »[1]. En plus de cela, Le magistère pose le mariage comme le fondement d’une famille chrétienne dont la finalité est la volonté de Dieu : « Le fondement de la famille réside dans la libre volonté des époux de s’unir en mariage, dans le respect des significations et des valeurs propres à cette institution qui ne dépend pas de l’homme mais de Dieu lui-même » (C.D.S.E. n°215).
L’amour est un élément incontournable pour garantir cette union. La constitution pastorale Gaudium et Spes qualifie cette union d’"alliance conjugale". Les époux devenus un par cette alliance « s’aident et se soutiennent mutuellement par l’union intime de leur personnes et de leurs activités, ils prennent ainsi conscience de leur unité et de leur approfondissement sans cesse d’avantage » (G.S. n°48). L’essence et les devoirs de la famille sont déterminés par l’amour, d’où l’obligation pour celle-ci d’en être le reflet et la source. C’est dans ce sens que le Pape Jean-Paul II dit : « La famille a la mission de devenir toujours ce qu’elle est c’est-à-dire communion de vie et d’amour dans une tension qui trouvera son achèvement comme toute réalité créée et sauvée dans le royaume de Dieu » (F.C. n°17).
La famille est aussi un lieu de communion de vie entre les membres. Et le Pape Jean-Paul II de dire : « la famille est en effet une communauté de personne, pour laquelle la vraie façon d’exister et de vivre ensemble est la communion "communion personarum" » (L.F. n°7). C’est la communion qui soutient et garantit une famille par l’effort authentique de tous les conjoints. L’Eglise a élaboré les devoirs principaux qui incombent à toute famille chrétienne. Ces éléments sont : la formation d’une communauté de personnes, la famille comme source de vie et de participation au développement de la vie sociale et de l’Eglise (Cf. F.C. n° 18-64)
I. 3. Conception sociale
La société distingue la famille nucléaire et la famille élargie. La première est constituée des époux et de leurs enfants. C’est la famille au sens étroit ou restreint. La famille élargie regroupe toutes les personnes se réclamant d’une même ascendance biologique ou légale, par exemple la famille africaine.
La société, à travers le droit civil, distingue aussi les familles en fonction de la légitimation ou non de l’union des conjoints. Ainsi, l’on distinguera trois sortes de familles suivant la loi[1] :
- La famille légitime, dérivant de l’union des personnes de sexes différents et qui procréent dans le cadre du mariage ;
- La famille naturelle, constituée par une procréation hors mariage ;
- La famille adoptive résulte d’un acte juridique. Elle offre les mêmes droits et les mêmes devoirs que l’enfant légitime à l’enfant adopté.
Toutefois, le droit civil ne reconnaît pas le mariage comme étant un engagement définitif, indissoluble et irrévocable. C’est pourquoi il prévoit et légitime le divorce. C’est là la différence fondamentale entre le mariage civil et le mariage religieux.
II. RAPPORTS RECIPROQUES ENTRE LA FAMILLE ET LA SOCIETE
II.1. Impact de la famille sur l’individu
II.1.1. L’amour comme base du développement de la personne humaine
La famille est le cadre par excellence où l’être humain apprend à se connaître lui-même en relation avec l’altérité. C’est à ce titre que Monseigneur Maurice E. Piat, Evêque de Port-Louis a pu dire : « La famille est une institution vitale pour le développement équilibré des êtres humains »[1]. Ce développement concerne l’homme dans son intégrité. Dans le couple, chaque personne est reconnue, accueillie et respectée dans sa dignité, ce qui la dispose à donner et à recevoir ce qu’on ne peut ni acquérir, ni vendre, mais accorder librement et mutuellement (Cf. C.D.S.E. n°221).
En tant que berceau de la vie, la famille est le milieu où le nouveau né acquiert la conscience de son identité et commence à forger son être rationnel en relation avec ses parents, ceci grâce à l’amour de ces derniers qui le sécurise. Aussi, la présence des enfants consolide l’amour des parents dans la mesure où, en tant que don excellent du mariage, ils contribuent grandement au bien des parents eux-mêmes (Cf. G.S. n°50). En effet, les enfants permettent à l’homme et la femme de s’ouvrir continuellement à la fécondité d’un « nous » toujours plus ouvert à l’autre, fruit de leur amour ; et réciproquement, cette capacité d’ouverture s’opère pour les enfants à l’égard de leurs parents. De ce vécu de l’amour mutuel, nous pouvons affirmer avec l’Eglise que « la santé de la personne et de la société tant humaine que chrétienne est étroitement liée à la prospérité de la communauté conjugale et familiale » (G.S. n°41). C’est dans cette atmosphère de sécurité que l’enfant prend confiance en lui-même et commence à se responsabiliser à travers les différentes tâches qui lui sont confiées dans la famille. Ainsi, la famille répond aux besoins fondamentaux de l’être humain à savoir le besoin d’aimer et d’être aimé, le besoin d’être accueilli et de se réconcilier quand l’unité a été blessée, le besoin de se développer moralement et spirituellement, le besoin d’appartenir à un groupe et d’être identifié culturellement, d’où la nécessité de l’éducation.
II.1.2. Le devoir d’éducation
Les parents sont les premiers agents de l’éducation et sont irremplaçables. Leur devoir d’éducation s’enracine dans l’amour ; amour qui se prolonge dans la transmission de la vie et dans la culture des valeurs éthiques. C’est dans un climat de douceur, de constance, de bonté, de service, de désintéressement, et d’esprit de sacrifice que ces valeurs trouvent leur essor. Nous pouvons souligner notamment le don de soi, la simplicité de vie, la droiture et le sens de la justice car « de source qu’il était, l’amour des parents devient ainsi l’âme et donc la norme qui inspire et guide toute l’action éducative concrète » (C.D.S.E. n°239).
Au sein de la famille, l’éducation est essentiellement transmission des valeurs. Par elles, l’enfant intègre progressivement la société dans laquelle il fera désormais partie car, « à travers l’œuvre d’éducation, la famille forme l’homme à la plénitude de sa dignité sous toutes ses dimensions, y compris la dimension sociale » (C.D.S.E. n°238). L’éducation est avant tout une expérience faite par les parents avec leurs enfants et vice versa, dans la découverte mutuelle. A travers les évènements de chaque jour, les valeurs culturelles, sociales, spirituelles et religieuses nécessaires au développement se transmettent par osmose. C’est dans ce sens que le Compendium affirme : « En exerçant sa mission éducatrice, la famille contribue au bien commun et constitue la première école de vertus sociales, dont toutes les sociétés ont besoin » (C.D.S.E. n°238).
Les parents ont aussi le devoir d’éduquer leurs enfants à la foi. Il est vrai que toutes les religions intègrent en quelques sortes les valeurs de la conscience humaine, mais pour une bonne éducation éthique, il est tout à fait nécessaire que les parents proposent à leurs enfants de croire en Dieu, car « agir moralement sera en même temps dire un « oui » au Dieu auquel on croit »[1]. Pour les parents chrétiens, cette éducation à la foi est encrée dans le sacrement du mariage et leur témoignage de vie. Pour une éducation intégrales, les enfants ont besoin, en plus de l’éducation affective, morale et religieuse, d’une éducation professionnelle pour être des personnes équilibrées et des citoyens accomplis, d’où la nécessité de les envoyer à l’école.
Cependant, les parents restent les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants. C’est pour cela qu’ils ont le devoir de choisir pour leurs enfants le type d’institution éducative qui corresponde à leurs convictions morales et religieuses.
II.2. Impact de la famille sur la société
La procréation est un devoir et une obligation pour la famille envers la société car, les hommes et les femmes issus des familles, non seulement sont la société, mais aussi ils en constituent la main d’œuvre. C’est par et grâce à eux que la société existe, fonctionne et se renouvelle. Si la famille n’assume pas la responsabilité de produire des membres pour pérenniser la société, celle-ci est appelée à mourir. Dans Familiaris Consortio, le Pape Jean Paul II affirme : « Le rôle social de la famille ne peut certainement pas se limiter à l’œuvre de la procréation et de l’éducation, même s’il trouve en elle sa forme d’expression première et irremplaçable » (F.C. n° 44).
Les familles isolément ou en association doivent s’intégrer et s’engager dans la vie sociale et politique de leurs cités. La société a besoin de la famille dans ses différentes activités et structures pour fonctionner et se construire de façon harmonieuse et équilibrée. Pour ce faire, « ce sont les familles qui en premier lieu doivent faire en sorte que les lois et les institutions de l’Etat non seulement s’abstiennent de blesser les droits et les devoirs de la famille, mais encore les soutiennent et les protègent positivement » (F.C. n° 44).
La famille est donc la cellule première et vitale de la société. En elle, la nation trouve la racine naturelle et féconde de sa grandeur et de sa puissance : « La famille a des liens organiques et vitaux avec la société parce qu’elle en constitue le fondement et qu’elle la sustente sans cesse en réalisant son service de la vie : c’est au sein de la famille en effet que naissent les citoyens et c’est dans la famille qu’ils font le premier apprentissage des vertus sociales, qui sont pour la société l’âme de sa vie et de son développement » (F.C. n° 42)
II.3. Impact de la société sur la famille
Les exigences de la personne humaine, nées de sa dignité, impliquent la responsabilité de la société à l’égard de la famille. Mais les mutations socioculturelles exercent une influence certaine sur celle-ci.
II.3.1. Impact des mutations socioculturelles
Le progrès de la science et de la technique a entrainé la modification des rapports et des fonctions dans la famille. La robotisation et les progrès de la médecine ont libéré la femme en l’ouvrant à d’autres occupations autres que la procréation : « La fonction de maternité n'est plus celle qui définit l’existence et la finalité de la femme mariée, désormais disponible pour d’autres tâches »[1]. A cela, s’ajoute l’allongement de l’espérance de vie qui oblige le couple à trouver des motivations autres que la procréation pour rester stables dans la durée.
Dans une société « dépersonnalisante »[1], le couple doit quelques fois faire face à la concurrence des centres d’intérêt, extérieurs à la famille, de l’un ou des deux conjoints à la fois (loisirs, profession, politique…). Ces occupations constituent parfois un risque d’éclatement de la cellule familiale, dans la mesure où elles occupent les conjoints et peuvent les attirer jusqu’à les détourner de l’idéal commun au couple.
L’urbanisation, tout en offrant des possibilités de rencontres enrichissantes, fait courir le risque de divergence et de dérive aux membres de la famille, attirés par des centres d’attraction différents. Les media, et notamment la télévision, en sont un exemple : « Elle peut aussi bien regrouper les membres de la famille autour du même spectacle, qu’accentuer par contre la divergence des réactions »[1].
Dans le combat des individus pour la liberté ou contre toute norme imposée de l’extérieur, l’individualisme s’installe dans les mentalités. Au nom de cette même liberté, les familles sont soumises à la dépravation des mœurs à travers les publicités et les films. La libération sexuelle ainsi affichée constitue un risque certain pour la fidélité conjugale et la discipline dans l’usage de la sexualité. En outre, certaines lois civiles tendent à fragiliser le lien conjugal et familial par leur permissivité. Il s’agit d’une « corruption du concept et de l’expérience de la liberté […] comprise non pas comme la capacité de réaliser la vérité du projet de Dieu sur le mariage et la famille, mais comme une force autonome d’affirmation de soi, assez souvent contre les autres, pour son bien-être égoïste » (F.C. n°6). Encouragés par des gouvernements et par certains organismes internationaux, certaines sociétés sacrifient les familles sur l’autel des problèmes sociaux, économiques ou démographiques, à travers des lois immorales sur le divorce, la contraception, la stérilisation, l’avortement, les mariages homosexuels et l’euthanasie, sensées résoudre ces problèmes.
Il se trouve aujourd’hui que la structure familiale est menacée dans ses fondements par des « structures sociales, économiques et politiques qui sécrètent l’injustice, l’oppression et la dépendance » (S.E. n° 4). A cause des idéologies et autres courants de pensée, les jeunes se retrouvent déstabilisés au plus profond d’eux-mêmes. Ainsi ils sont empêchés de se marier et de mener une vie décente. Les modèles de réussite, de beauté, de liberté… bref, les modèles d’homme ou de femme épanouies qui leur sont proposés ne sont pas de nature à favoriser le mariage. Ils sont, pour ainsi dire, victimes d’ « un affaiblissement de l’intelligence et du cœur qui fait écran à la perception du dessein de Dieu sur l’existence humaine » (S.E. ibid.).
La famille, en tant que noyau de la société a plus que jamais besoin d’être respectée dans ses droits.
II.3.2. Le respect des droits de la famille
Les rôles de la famille et de la société s’imbriquent dans la défense et la promotion du bien commun. Mais conformément au principe de subsidiarité, il incombe à la société de reconnaître et de promouvoir la famille en tant qu’elle est une « société jouissant d’un droit propre et primordial » (D.H. n°5) ; par exemple l’Etat doit lui fournir l’aide économique, sociale, éducative, politique et culturelle nécessaire pour répondre à ses obligations.
Pour ne pas être phagocytée par la société, il convient de reconnaître certains droits (Cf. F.C. n°46) à la famille et de les respecter :
- Droit pour tout être humain de fonder une famille et de l’entretenir.
- Droit de la famille à exercer sa mission quant à la transmission de la vie et l’éducation de ses enfants.
- Droit à l’intimité de la vie conjugale et familiale.
- Droit à la stabilité du lien conjugal et du mariage.
- Droit de croire, de professer et de répandre sa foi.
- Droit d’éduquer ses enfants conformément à sa culture et à ses valeurs.
- Droit de jouir de la sécurité physique, sociale, politique, économique.
- Droit à un logement permettant de mener une vie familiale décente.
- Droit d’expression et de représentation devant les autorités de façon directe ou à travers les associations.
- Droit d’association avec d’autres familles pour remplir convenablement sa mission.
- Droit de protection des mineurs contre des drogues nuisibles, la pornographie… par des institutions et des lois conséquentes.
- Droit à des loisirs honnêtes favorisant et promouvant les valeurs familiales.
- Droit de vivre et de mourir dignement surtout pour les personnes âgées.
- Droit, comme famille, à l’émigration pour chercher de meilleures conditions de vie.
III. EVALUATION CRITIQUES
III. 1. Considérations positives de la famille actuelle
Après un parcours analytique de notre thème, que pouvons nous dire en termes synthétiques?
La famille occupe incontestablement une place de choix dans la société. D’une part, elle est une « Institution universelle voulue par Dieu »[1] ; d’autre part, elle doit être un signe visible de l’amour de Dieu. Le discours catéchétique définit les relations internes de la famille en spécifiant à chaque membre ses rôles et fonctions.
D’autres éléments viennent renforcer ces liens familiaux comme : la fidélité, la fécondité.
III.2. Quelques dérives actuelles de la famille
En analysant quelques lignes du « Déclin de la morale ? Déclin des valeurs ? »[1] Avec Raymond Boudon, nous constatons que la société actuelle tend de plus en plus vers une liberté irresponsable et téméraire, au libertinage et à l’approbation de toutes fantaisies.
Aucun sens éthique ne peut être donné à la famille lorsque le mariage est homosexuel et non plus hétérosexuel. Cela constitue des déviances. Pour l’africain, tout au moins, les rapports sexuels homme-homme ou femme-femme restent abominables.
En plus, les expressions « fiancé », « époux », sont substituées par celles de « père de mon enfant », « bureau ». L’idéal d’une relation est résumé dans les sens connotés des mots « chic », « choc », « chèque », traduisant respectivement l’extrême beauté, l’extrême virilité et la capacité prompte à résoudre les problèmes financiers de l’être aimé. De même, les unions libres ou phénomènes de « viens, on reste » semblent être des idéaux de vie. L’ivrognerie a affermi l’escroquerie, l’escroquerie le mensonge, le mensonge le vol, le vol l’intérêt, l’intérêt la considération et l’estimation exclusive de l’autre en fonction de ses biens, au-delà de son humanité. Tout cela nous donne l’impression d’un retour à Sodome et Gomor. Ce n’est qu’une impression parce que nous ne voulons être ni fataliste, ni pessimiste encore moins mécréant.
Il est important, par conséquent, que le message évangélique continue, au-delà de toute réticence, à être transmis aux chrétiens. En outre, même si l’ouverture au monde, à la civilisation planétaire dont l’Internet est aujourd’hui le puissant médium est absolument nécessaire, elle doit être maîtrisée. Ceci « en faveur de la formation d’un camerounais imprégné de certaines valeurs africaines ancestrales dont le rayonnement fait la fierté de l’Afrique »[1].
CONCLUSION
Au terme de notre travail, nous pouvons dire avec le Pape J.P. II que la famille est «la cellule première et vitale de la société » (F.C. n°42). En effet, la famille est la base fondamentale et essentielle de l’organisation sociale. Elle occupe une place de choix dans l’enseignement social de l’Eglise parce qu’elle est non seulement voulue par Dieu, mais aussi parce qu’elle est le lieu indiqué pour faire passer le message évangélique de manière effective. Au-delà de l’influence réciproque qui existe entre la société et la famille, celle-ci reste le moule qui prépare l’individu à vivre avec ses semblables. En son nom, l’Eglise légitime la filiation universelle de tout être humain car, nous sommes non seulement fils de Dieu, mais aussi héritiers de son Royaume. L’image parfaite en est celle de Joseph, Marie et Jésus, même si de nos jours déviances de toutes sortes, dérives profondes et sans éthique la transforme en un simple lieu d’assouvissement de plaisir sexuels. A l’apport de l’Eglise, l’Etat devrait associer une législation avec un souci éthique réel et profond.

BIBLIOGRAPHIE
I. Source
La Bible de Jérusalem

II. Documents du Magistère
CONSEIL PONTIFICAL JUSTICE ET PAIX, Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, Vaticana, Fidélité, 2005, 530 p.

JEAN-PAUL II, Exhortation apostolique Familiaris consortio sur les tâches de la famille chrétienne dans le monde d’aujourd’hui, Paris, Cerf, 1981, 191 p.

---------------------, Lettre aux Familles, Paris, Cerf, 1994, 110 p.

SYNODE DES EVEQUES, La famille chrétienne. Message du synode. Discours de Jean-Paul II. Lettre des Evêques français, Paris, Centurion, 1980, 91 p.

VATICAN II, Les seize documents conciliaires, Montréal et Paris, Fides, Collection Pensée Chrétienne, 1967, 671 p.
III. Oeuvres
AUBERT J.- M., Droits de l’homme et libération évangélique, Paris, Le centurion, 1987, 286 p.
BOUDON R., Déclin des valeurs ? Déclin de la morale ? Paris, PUF, 2002, 113 p.
CHABOT. J., La doctrine sociale de l’Eglise, Paris, PUF, 1989, 128 p.
COLL., La société désorientée, P.U.F, Desclée, Paris, 1978, 198 p.
COLL., Gaudium et spes : Bilan de trente années. Rencontre mondiale, Lorette, 9-11 novembre 1995, Cité du Vatican, 1996, 302 p.
COLOMBET C., La famille, Paris, PUF, 1990, 384 p.
DAUJAT. J., L’ordre social chrétien, Paris, Beauchesne, 1970, 547 p.
DELAYE. E., Eléments de morale sociale : Inspirée des principes chrétiens, Paris, Spes, 1939, 198 p.
MVESSO A., Pour une nouvelle éducation au Cameroun. Les fondements d’une école citoyenne et de développement, Yaoundé, P.U.Y, Collection Sociétés, 2005, 139 p.
PIAT M. (Mgr), La vocation de la famille, Lettre pastorale du carême, Yaoundé, C.D.O. 1994. 78p.

TABLE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
C.A. : Centesimus Annus
C.D.S.E. : Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise
R.N. : Rerum Novarum
D.S.E. : Doctrine Sociale de l’Eglise
G.S. : Gaudium et Spes
L.E. : Laborem Exercens
M.M. : Mater et Magistra
C.E.C. : Catéchisme de l’Eglise Catholique
O.N.U. : Organisation des Nations Unis

INTRODUCTION
La valorisation du travail, considéré comme une des activités humaines, propre et essentielle à l’homme, a été négligée dans la philosophie Antique. En effet, le travail portait essentiellement sur un objet physique. Au fur et à mesure que les années se succèdent, le travail artisanal et agricole ont laissé place au travail industriel. Et c’est cette dernière forme qui a le plus suscité de sérieux problèmes liés à la dignité de la personne humaine, qui se voit très souvent bafouée dans la mesure où l’homme est utilisé comme un moyen et non comme le sujet du travail. Face à cette menace, l’Eglise avec sa Doctrine Sociale préconise des solutions pour valoriser le travail humain et par là, la dignité de l’homme. Dès lors, quel genre de travail permet-il à l’homme de réaliser son humanité ? Telle est la question qui nous servira de fil conducteur dans notre réflexion qui portera sur : l’approche conceptuelle et biblique du travail, la dignité du travail humain, les problèmes du travail humain, le rôle de l’Etat et des syndicats et enfin l’évaluation critique.
I. Approche conceptuelle et biblique du travail
I.1. Conception philosophique du travail humain
De son étymologie latine « tripalium » qui signifie instrument de trois pieux destinés à maintenir les chevaux difficiles pour les ferrer[1], le travail désigne à la fois la souffrance et suggère l’assujettissement. La nécessité du travail est d’abord le signe de l’aliénation de l’homme car : « Le travail est de prime abord un acte qui se passe entre l’homme et la nature. L’homme y joue lui-même vis-à-vis de la nature le rôle d’une puissance naturelle […] Dès qu’il est tant soit peu développé, le travail ne saurait se passer des moyens déjà travaillés »[2]. Le travail humain peut se définir alors comme l’acte par lequel l’homme apprend à se connaître, à agir sur le monde en le respectant et en l’humanisant.
I.2. Conception de la D.S.E.
I.2.1. L’enseignement social de l’Eglise
L’Eglise puise son enseignement dans la loi naturelle et la Révélation[3]. Cet enseignement s’adapte et s’applique aux problèmes sociaux de notre temps, afin d’aider, selon la manière propre de l’Eglise, les peuples et les gouvernants à organiser une société plus humaine et conforme au dessein de Dieu sur le monde. Il définit le travail comme « un bien de l’homme. Non pas seulement un bien utile ou dont on peut jouir, mais un bien digne, c’est-à-dire qu’il correspond à la dignité de l’homme, un bien qui exprime cette dignité et qui l’accroit »[4] et aborde le travail selon un triple caractère : il est personnel, nécessaire et social.
Le travail est personnel dans la mesure où l’homme engage toute son humanité dans le travail qu’il accomplit. Les applications se laissent dégager à travers la dignité et les conditions du travail. Par rapport à la dignité du travail, la D.S.E. s’oppose à la fois au libéralisme qui assimile le travail à une marchandise et au communisme qui considère dans le travail une force productrice au service de l’état socialiste. Ce principe a ses répercussions sur les conditions du travail. Puisque le travail est inséparable de la personne, l’enseignement social de l’Eglise réclame l’établissement des conditions du travail qui respectent ce caractère personnel ainsi que la dignité du travailleur[5].
Le travail est nécessaire en ce sens qu’il permet à l’homme de se procurer ce qui est indispensable pour le faire vivre, lui et sa famille[6]. C’est pourquoi chaque homme a le devoir que lui impose la nature, de conserver l’existence, laquelle ne lui appartient pas.
Le travail est social dans le sens où l’Eglise le considère comme le moyen offert par Dieu aux hommes de coopérer à son œuvre de création et de construire eux-mêmes, tous ensemble, une cité terrestre. Aussi, Pie XII découvre dans le travail un facteur d’unité entre les hommes : « Le travail unit les hommes au service du peuple dans un effort commun pour le perfectionnement de chacun et de tous à la gloire du Créateur et du Rédempteur »[7].
I.2.2. Fondements bibliques
« L’Eglise est convaincue que le travail constitue une dimension fondamentale de l’existence de l’homme sur la terre […] l’Eglise tire cette conviction avant tout de la source qu’est la parole de Dieu révélée, et c’est pourquoi ce qui est une conviction de l’intelligence acquiert aussi le caractère d’une conviction de foi. »[8]. Nous pouvons dégager dans la bible quelques idées clées de la conception chrétienne du travail.
Le travail est intimement lié à la personne humaine : « Yahvé Dieu prit l’homme et l’établit dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le garder »[9] ; « Pendant six jours tu travailleras et tu feras tout ton ouvrage »[10]. Il peut être une source de peine : « A la sueur de ton visage tu mangeras ton pain »[11], ou encore : « Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai »[12]. Mais, on voit bien que l’essence du travail ne se limite pas à cette peine. Celle-ci est seulement le résultat du péché originel qui a brisé l’harmonie entre l’homme et son univers. Sa finalité peut devenir chrétienne : « Travaillez non pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure en vie éternelle »[13] ; « Que celui qui volait ne vole plus ; qu’il prenne plutôt la peine de travailler de ses mains, au point de pouvoir faire le bien en secourant les nécessiteux »[14]. Mais sa finalité ne saurait être l’enrichissement à outrance car « Que sert donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il ruine sa propre vie ? »[15]. Le travail peut alors être une source d’estime et surtout de salut : « Nous vous demandons, frères, d’avoir de la considération pour ceux qui se donnent de la peine au milieu de vous, qui sont à votre tête dans le Seigneur et qui vous reprennent. Estimez-les avec une extrême charité, en raison de leur travail »[16] ; « Puis j’entendis une voix me dire, du ciel : ‘Ecris : Heureux les morts qui meurent dans le Seigneur ; dès maintenant – oui, dit l’Esprit – qu’ils se reposent de leurs fatigues car leurs œuvres les accompagnent’ »[17]. Ainsi, toutes les fois que le Magistère intervient à travers la D.S.E. soit pour enseigner soit pour défendre et protéger certaines valeurs, c’est au nom de la vérité divine qui se trouve dans la Révélation. A n’en point douter, le travail occupe une place très importante dans la bible vu que Dieu lui-même est un travailleur[18]. De ce fait, travailler pour l’homme revient à participer à l’œuvre créatrice de Dieu et à confirmer sa ressemblance à son créateur. Le travail fait de l’homme le reflet de la transcendance et constitue pour l’esprit humain une ouverture vers l’ontologie divine.
II. Dignité du travail humain
La dignité de l’homme entendue comme le respect que mérite la personne, est universelle parce que l’image divine est en tous. Cette dignité implique pour tout homme des droits fondamentaux, indispensables pour son existence personnelle et pour sa vie sociale.
II.1. Dimension objective et subjective du travail
II.1.1. Dimension objective du travail
Cette dimension repose sur le fait que le travail soit considéré dans ses résultats et moyens de productions. Contrairement à la dimension subjective qui est stable parce que touchant l’être de l’homme, la dimension objective est contingente et varie sans cesse avec l’évolution des nouvelles techniques. Cette machinalisation des moyens de productions augmente sans doute la puissance de l’homme et crée en même temps, les conditions d’un nouvel asservissement qui prend la forme de la routine. La D.S.E. est pour le travail de l’homme, mais contre tout travail qui amoindrit en l’homme sa dignité de fils de Dieu créé à son image. Tout travail humain, bien qu’ouvrant à la charité entre tous les hommes, devrait contribuer à rapprocher de plus en plus l’homme de son créateur.
II.1.2. Dimension subjective
Le travail au sens subjectif touche l’agir de l’homme. Son objet de réflexion est l’être-au-travail. Cet être qui est capable d’accomplir des actions correspondant à sa vocation propre : celle de soumettre la terre et de la dominer rationnellement comme sujet créé à l’image de Dieu. Sur un plan purement éthique, le travail considéré dans son acte, est caractérisé de plusieurs manières répondant aux valeurs morales. Comme pense Canguilhem[19], le travail exprime le besoin de gagner sa vie. Ce qui ouvre aux valeurs de l’autonomie, du courage. L’être qui ne travaille pas est dépendant et peut voir sa liberté menacée. Et saint Paul nous invite à faire de notre travail un point d’honneur tout en évitant d’être à la charge des autres[20]. Le travail est aussi la réalisation de quelque chose qui dit l’être du réalisateur. Le personnaliste Mounier disait que tout travail, travaille à faire un homme en même temps qu’une chose[21]. Les valeurs ici sont celles de la responsabilité et de l’initiative. Au sens subjectif, le travail ne dépend ni du genre, ni de la réalisation de l’homme, mais seulement de la dignité de ce dernier. En effet « la subjectivité confère au travail sa dignité particulière ; qui empêche de le considérer comme une simple marchandise ou comme un élément impersonnel de l’organisation productive »[22].
II.2. Droits et devoirs du travailleur
II.2.1. Le droit au travail et les droits du travailleur
Certains penseurs présentent l’homme dans l’univers comme un élément de celui-ci, à la différence des autres qu’il est doué de raison. Cette raison lui donne la capacité de pouvoir renverser la situation du travail compris comme asservissement, pour faire de lui objet de libération. L’homme doit travailler pour vaincre, dominer les forces de la nature afin d’être maître et possesseur de la nature. « Le travail est un bien de tous, qui doit être disponible pour tous ceux qui en sont capables »[23] cette déclaration des Pères de l’Eglise fonde le droit au travail pour tous ceux qui peuvent l’exercer. Par le travail, l’homme s’assure les moyens de subsistance. Ne pas reconnaître le droit au travail ou le déprécier, c’est faire montre de la négation de la dignité de la personne humaine. Le Concile Vatican II se prononce de manière décisive : « le travail est un droit fondamental et c’est un bien pour l’homme »[24]. Le droit au travail trouve sa faisabilité dans la capacité de programmation de la société orientée vers le bien commun, pour éviter autant que faire ce peut le chômage.
L’homme qui travaille, à la différence des autres êtres qui transforment par quelques manières la nature, a des droits qui doivent être respectés. Il doit avoir recours à la grève quand c’est nécessaire, il doit bénéficier de la distribution des revenus et de la rémunération proportionnelle au travail fourni : « […] car l’ouvrier mérite sa nourriture »[25]. Le salaire est un mérite certes, c’est aussi l’un des baromètres qui mesure le degré de justice de l’employeur et même de tout le système socio-économique qui ouvre au principe de la destination universelle des biens (traités au premier exposé) : « Le salaire, c’est-à-dire la rémunération du travail, demeure la voie par laquelle la très grande majorité des hommes peut accéder concrètement aux biens qui sont destinés à l’usage commun, qu’il s’agisse des biens naturels ou des biens qui sont le fruit de la production »[26]. Pareillement il a droit au repos hebdomadaire et annuel, à l’assurance (maladie, accident, vieillesse) etc. Pour l’Eglise comme pour la société ces droits « sont tellement inviolables que, contre eux, aucune raison d’Etat, aucun prétexte de bien commun ne saurait prévaloir »[27].
II.2.2. Les devoirs du travailleur
A la création, Dieu invite l’homme à la soumission de la terre ; après sa chute, il lui dit : « A la sueur de ton visage tu mangeras ton pain »[28] . C’est désormais au prix de son travail que l’homme se nourrira pour entretenir en lui la vie. Ainsi se révèle son devoir, s’occuper utilement pour se procurer le pain quotidien et n’être à la charge de personne comme le dit saint Paul qui interdit de manger à celui qui ne veut pas travailler[29]. Le paresseux ou l’oisif se révèle ici comme un frein à l’éclosion de la continuité de l’œuvre créatrice de Dieu. Saint Ambroise le dit si bien : « chaque travailleur, est la main du Christ qui continue à créer et à faire du bien »[30] . En tant que prolongement du Christ dans son œuvre de bienfaisance, il va sans dire que les vertus qui accompagnent les travailleurs et se présentent comme devoir de ces derniers doivent lui appartenir. Nous parlons ici de la conscience professionnelle, du respect de la déontologie, de la ponctualité, du respect des horaires de service, de l’accomplissement vrai de la tâche à accomplir etc. Il s’agit pour le travailleur de bien faire son service au point d’être pour la postérité un modèle, mais surtout que cette tâche le rapproche de Dieu qui le sanctifie et fasse raisonner au creux de ses oreilles au soir de sa vie cette parole de Matthieu : « Très bien serviteur bon et fidèle […] entre dans la joie de ton maitre »[31].
II.3. L’importance du travail
II.3.1. Travail et survie
Le travail revêt une importance capitale dans la réalisation de l’homme et dans le développement de la société. Il possède une dimension personnelle mais aussi familiale. Il est le socle sur lequel se construit la vie de la famille. Une famille qui manque ne fusse que du nécessaire pour sa survie est un danger pour la société, c’est pourquoi poussé par la nécessité de remplir ses besoins, l’homme agit sur la nature qui lui permet de les satisfaire. C’est dans cette optique que le pape Jean Paul II disait : « Le travail est nécessaire pour fonder et faire vivre une famille»[32].
II.3.2. Travail et propriété privée
Le travail soulève la question de la propriété privée. L’Eglise conçoit différemment cette notion du capitalisme. Elle la considère dans un champ plus vaste qui est celui du droit commun de tous, d’user des biens que nous offre la création : «Le droit à la propriété privée est subordonné à celui de l’usage commun, à la destination universelle des biens »[33]. La propriété s’obtient à partir du travail et ceci concerne particulièrement la possession des moyens de production. Ces moyens ne sauraient être opposés contre le travail du fait qu’ils sont utilisés dans le but de permettre l’applicabilité du principe de la destination universelle des biens.
L’enseignement social de l’Eglise à travers l’encyclique Laborem Exercens cherche de façon continuelle à montrer le primat du travail, qui fait appel à la subjectivité de l’homme dans la vie sociale ainsi que dans l’économie. Le capitalisme s’oppose de façon farouche à cette idée dans la mesure où, il défend le droit de la propriété privée des moyens de production, comme vérité incontestable de la vie économique. La D.S.E. offre une proposition qui est celle de la copropriété des moyens de travail. Elle pense que le capitalisme doit être révisé en vue d’une position qui prend en compte les droits de l’homme.
Chercher donc à retirer les moyens de production (capital) des mains des propriétaires privés, ne résout pas entièrement le problème. Car ils quittent de la propriété privée d’un groupe quelconque pour devenir la propriété de l’Etat, sous le contrôle d’un groupe à qui on a confié le pouvoir de diriger. Ce groupe administrant l’institution, peut bien travailler en s’acquittant de ces fonctions mais, il peut aussi mal travailler en se substituant comme propriétaire et en violant les droits fondamentaux de l’homme. Le passage des moyens de production entre les mains de l’Etat ne veut pas dire que cette propriété est socialisée car : « On ne peut parler de socialisation que si la subjectivité de la société est assurée, c’est-à-dire si chacun, du fait de son travail, à un titre plénier à se considérer en même temps comme copropriétaire du grand chantier de travail dans lequel il s’engage avec tous »[34].
Une des solutions pour y parvenir serait d’unir le travail à la propriété du capital car le travail est inséparable du capital. L’homme qui travaille en utilisant les moyens de production, désire que les fruits de son travail soient profitables pour lui et pour les autres et qu’il soit considéré comme coresponsable dans cette œuvre.
II.3.3. Travail et promotion sociale
Le travail est aussi considéré comme une promotion sociale. Seuls les leaders sont considérés dans la société. Il règne dans le monde des travailleurs une certaine concurrence où chacun veut atteindre le plus d’échelon car chacun rêve de devenir chef. Aujourd’hui il y a une quête effrénée de promotion sociale ; et par conséquent celui qui parvient à être chef ne pense plus à redescendre. D’où l’accession à un grand poste devient un luxe, un honneur. L’homme qui a étudié, veut avancer plus loin dans ses études, bref ceci est vrai pour n’importe quel domaine du travail.
II.3.4. Travail et loisir
Le travail peut aussi être considéré comme une activité qui permet à l’homme de se détendre, se distraire. C’est le cas des activités sportives comme le football, la natation, la gymnastique etc. Activités très pratiquées par les hommes de tout âge dont le but est de déloger le stress, la fatigue en fin de journée ou pendant le weekend. De nos jours, certaines de ses activités de loisirs sont devenues les sources de revenus.
III. Problèmes du travail humain et apports de la D.S.E.
III.1. Le chômage
Face aux multiples demandes d'emplois adressées au marché du travail, les Etats et les employeurs, ne pouvant recruter tout le monde, se trouvent dans l'obligation de réduire le nombre d'offres. Dès lors, même si l'accès au métier se présente comme un droit et un bien pour l'homme, il se pose l'épineux problème du travail pour tous. En effet, bien que la révolution industrielle ait amélioré les conditions de vie de l'homme, elle ne s'est pour autant pas empêchée de ratifier le licenciement de beaucoup de personnes en faveur des machines et même des robots. Le problème du chômage se pose donc avec acuité dans nos sociétés modernes, industrialisées. Vu comme « une véritable calamité sociale »[35], le chômage a des conséquences néfastes sur la vie du chômeur, entre autres le manque de revenu à gagner, l'exclusion sociale ou encore un pessimisme angoissant face à l'avenir. C'est dans ce sillage que le Catéchisme de l'Eglise Catholique abonde: « Celui qui est sans emploi ou qui est sous employé subit, de fait les conséquences profondément négatives que cette condition entraîne sur sa personnalité et il risque d'être placé en marge de la société, de devenir une victime de l'exclusion sociale »[36].
De plus, le manque d'emploi est d'autant plus dramatique quand il concerne surtout les jeunes, qui assistent impuissamment à l'évaporation de leur espoir de réalisation humaine et professionnelle[37]. C'est pourquoi, le Pape Jean Paul II ne s'empêche pas d'affirmer qu’« il devient un problème particulièrement douloureux lorsque sont frappés principalement les jeunes qui, après s'être préparés par une formation culturelle, technique et professionnelle appropriée, ne réussissent pas à trouver un emploi et, avec une grande peine, voient frustrer leur volonté sincère de travailler et leur disponibilité à assumer leur propre responsabilité dans le développement économique et social de la communauté »[38]. Quant à la Doctrine Sociale de l'Eglise, elle juge que l'unité de mesure qui permet de discerner si un peuple est orienté vers le bien commun se remarque dans sa capacité à gérer le chômage. Dans le même temps, les jeunes sont invités à user de leur esprit de créativité afin de pouvoir se tirer d'affaire dans ce monde où les chances de réussite sont de plus en plus minces pour les défavorisés.
III.2. Le problème du travail des enfants
Le phénomène du travail des enfants est récurent dans la quasi-totalité des sociétés tant développées que sous développées. De ce fait, il n'est pas rare de voir des enfants travaillant dans les mines à leur risque et péril, des enfants soldats, des enfants ouvriers, etc. Toutes ces formes de travail des mineurs quoique importantes pour l'économie tant familiale que sociale est un abus de la dignité et une exploitation des enfants. C'est dans ce contexte que la D.S.E. dénonce l'augmentation de l'exploitation du travail des enfants comme un fléau social[39]. Dans la même lancée Jean Paul II mentionne que « dans certains pays, il y a des enfants qui sont contraints à travailler à un âge encore tendre, qui sont maltraités, punis avec violence, rétribués avec un salaire dérisoire ils n'ont aucun moyen de se faire valoir : ils sont donc les victimes les plus faciles du chantage et de l'exploitation »[40].
En effet, le travail précoce, comme une forme de violence, ne tient compte ni des forces de l'enfant ni de son état psychologique de mineur et finit par lui voler son enfance. Cette exploitation au-delà de toutes ses implications tant politiques, économiques que juridiques, reste un problème essentiellement moral et mérite d'être pris très au sérieux par les acteurs politiques[41]. C'est pourquoi le Pape Léon XIII comme une mise en garde dit : « L'enfant en particulier - et ceci demande à être observé strictement - ne doit entrer à l'usine qu'après que l'âge aura suffisamment développé en lui les forces physiques, intellectuelles et morales. Sinon, comme une herbe encore tendre, il se verra flétri par un travail trop précoce et c'en sera fait de son éducation »[42]. En bref, l'enfant a le droit d'être respecté dans sa dignité d'être humain et dans sa condition de mineur au risque de le voir réduit en esclave dans le monde socio-économique du travail. C'est la raison pour laquelle l'Eglise dénonce avec force l'exploitation des faibles dont les petits enfants en font partie.
III.3. La discrimination sociale
La discrimination sociale est l’action d’isoler et de traiter différemment certains individus ou groupes d’individus[43] en fonction de leur sexe, situation sociale, leur état de santé et leur situation professionnelle.
Selon le premier et le second article des droits de l’homme de 1948, « Tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droit. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité », et « Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente déclaration sans distinction aucune notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou d’autres opinions d’origine nationale, sociale, de facteur de naissance ou de toute autre situation », la discrimination sociale apparaît ici comme une distinction qui se réalise au sein de la société, ayant pour but de dévaloriser la personne humaine en fonction de son sexe, son statut social, politique, professionnel etc. Les discriminations sociales les plus fréquentes sont celles qui sont faites à l’égard de l’agriculteur, de la personne handicapée, de l’immigré et de la femme.
III.3.1. Différentes discriminations sociales
· La situation de l’agriculteur
Le travail de l’agriculture, bien qu’il constitue un pourcentage important dans l’économie nationale de nos pays, est très souvent minimisé, dévalorisé. En effet, l’agriculteur est un travailleur qui n’est ni encouragé ni aidé, ni pris en compte dans sa besogne parce que dit-on souvent « c’est un travail de pauvre, des illettrés, des villageois » ; d’où la situation précaire de ce dernier qui se sent abandonné à lui-même, exploité par son employeur, bref condamné à demeurer dans sa misère agricole.
· La situation de la personne handicapée
La personne handicapée en tant qu’être humain a besoin de s’épanouir dans une activité sociale comme celle du travail pour pouvoir réaliser comme tout individu son besoin de créer, de produire et de s’affirmer. Triste est de constater que la société ne lui réserve pas toujours l’accueil qu’il lui faut dans la mesure où dans bons nombres des sociétés, les structures ne sont pas prévues pour son intégration sociale, d’où cette mise à l’écart et ce refus de lui octroyer tel travail, tel poste.
· La situation de l’immigré
De part le monde entier, la situation de l’immigré est à décrier à cause de l’injustice qui l’accompagne. En effet, la réalité révèle que les immigrés sont des personnes qui sont favorisées ou défavorisées dans le pays d’accueil à cause d’un motif ou d’un autre.
· La situation de la femme
Dans presque toutes les sociétés, la femme rencontre des problèmes liés à son intégration sociale. En effet, le génie féminin n’est pas toujours accepté comme apport efficace dans le développement social. C’est pourquoi le problème de la promotion sociale de la femme se pose dans la mesure où celle-ci est souvent contrainte d’accepter un poste qui ne correspond pas à ses compétences, ses qualifications par souci d’éviter le chômage.
III.3.2. Apport de la D.S.E. face à ces différentes discriminations
Face à ces discriminations sociales suscitées, la D.S.E. a émis une certaine conduite à tenir pour pallier progressivement ces dernières. Dans cette optique qu’elle préconise que :
- Le travail de l’agriculteur soit valorisé parce qu’il répond à l’ordre de Dieu qui désigna l’homme pour dominer la terre ; elle lance un appel « à promouvoir la dignité du travail et spécialement du travail agricole grâce auquel l’homme de manière éloquente soumet la terre reçue comme un don de Dieu et affermit sa domination sur le monde visible »[44]. En d’autres termes, le travail agricole doit être valorisé en raison du rôle social, économique et culturel qu’il joue dans nos différents pays sans oublier d’améliorer aussi la condition des agriculteurs.
- La personne handicapée doit être considérée comme un être humain à part entière d’où la nécessité de mener une action sociale en vue de réaliser les conditions de son intégration. Pour ce faire « tous doivent mettre la main à la pâte ; l’Etat, les O.N.G., la personne handicapée elle-même, et si possible adapter les structures dans chaque société pour la personne handicapée»[45].
- L’homme qui travaille en dehors de son pays ne doit pas exploiter l’entreprise où il travaille ni être exploité par l’entreprise qui l’a embauché. Car « la relation de travail avec le travailleur immigré doit valoir les mêmes critères que pour tout autre travailleur de la société ; la valeur du travail doit être estimée avec la mesure et non en considération de la différence, de nationalité, de religion, de race ni exploiter la situation de contrainte dans laquelle se trouve l’immigré »[46].
- La situation de la femme doit être améliorée dans la mesure où le génie féminin s’avère nécessaire dans toutes les dimensions ou expressions de la vie sociale. Par conséquent, les institutions nationales et internationales doivent reconnaître le droit de la femme à exercer une profession, à avoir un travail. C’est pourquoi la D.S.E. recommande « La vraie promotion de la femme, qui exige que le travail soit structuré de manière que celle-ci ne soit pas obligée de payer sa promotion par l’abandon de sa propre spécialité et au détriment de sa famille dans laquelle elle a en tant que mère un rôle irremplaçable »[47].
IV. Rôle de l’état et du syndicat par rapport au travail
IV.1. L’Etat
Jacqueline Russ définit l’Etat comme « une société organisée, ayant des institutions et organes politiques, administratifs, juridiques et un gouvernement »[48]. Il a pour rôle d’assurer le bien vivre et la sécurité de ses citoyens. L’une des plus grandes responsabilités de l’Etat est la promotion des politiques actives du travail. Il doit « soutenir l’activité des entreprises en créant les conditions qui permettent d’offrir des emplois, en les stimulant dans des cas où elles restent insuffisantes ou en les soutenant dans les périodes de crises »[49]. Cela se vérifie aujourd’hui avec l’implication des Etats dans le problème de la crise financière qui touche la plupart des entreprises mondiales. C’est dans l’encyclique Mater et Magistra de Jean XXIII, que le rôle de l’Etat est bien défini : « La raison d’être de l’Etat est la réalisation du bien commun dans l’ordre temporel (…) il doit protéger les droits de tous les citoyens, surtout les plus faibles comme les ouvriers, les femmes et les enfants. L’Etat a également le devoir de contribuer activement à l’amélioration des conditions de vie des ouvriers (…) il a le devoir de veiller à ce que les relations de travail se développent dans la justice et l’équité, que dans les milieux de travail la dignité de la personne humaine, corps et esprit ne soit lésée »[50].
Cependant, tous ces devoirs ne sauraient être accomplis si le mal le plus saignant de la société n’est pas traité. Il s’agit du manque d’emploi, communément connu sous le vocable de « chômage », qui est le contraire d’une situation juste et correcte dans le monde du travail. Pour y faire face, l’Eglise recommande à l’Etat de pourvoir à une planification globale qui soit en fonction de ce chantier de travail, de faire attention à l’organisation correcte et rationnelle du travail, et de garantir le développement des initiatives personnelles, des groupes, des centres et des ensembles de travaux locaux.
IV.2. Les syndicats
Selon le petit Larousse illustré, le mot syndicat désigne un groupement constitué pour la défense d’intérêts professionnels communs[51]. Dès ses débuts, le monde du travail s’est structuré dans une opposition radicale entre le capital et les travailleurs. En effet, un travailleur isolé ne pouvait pas obtenir satisfaction sur ses droits, car il était absolument démuni, dans une situation inégale, et soumis à une pression permanente tendant à le dégrader. La seule manière pour les travailleurs de défendre leur dignité et leurs droits était l’association syndicale qui, comme l’a souligné le pape Pie XII dans son message de Noël de l’an 1952, a pour but essentiel « l’affirmation pratique que l’homme est sujet et non l’objet des relations sociales ; de protéger l’individu en face des responsabilités collectives et des propriétaires anonymes ; de défendre la personne du travailleur devant ceux qui tendent à le considérer seulement comme une force productive et un prix déterminé »[52]. Dès lors, le syndicat apparaît comme étroitement lié à la prise de conscience collective par le monde ouvrier de sa dignité et de la place, qu’il doit tenir dans la construction d’un monde plus humain. C’est sur cette extension des syndicats qu’insistera le pape Jean XXIII lorsqu’il dira « qu’il est opportun, voire nécessaire, que la voix des travailleurs ait la possibilité de se faire entendre et écouter hors des limites de chaque organisme de production, à tous les échelons »[53]. Cette insistance est reliée par le Concile Vatican II qui proclame « qu’il faut mettre au rang des droits fondamentaux de personne celui des travailleurs à fonder librement des associations capables de les représenter de façon valable et de collaborer à la bonne organisation de la vie économique »[54]. De là, découle une obligation pour tout travailleur d’appartenir à un syndicat.
La reconnaissance du rôle fondamental des syndicats par le Magistère de l’Eglise est fondée sur le fait qu’ils prennent appui sur le droit des travailleurs à former des associations en vue de défendre leurs intérêts vitaux. C’est à ce titre que le pape Jean Paul II dira que « les syndicats modernes ont grandi à partir de la lutte des travailleurs, du monde du travail et surtout des travailleurs de l’industrie, pour la sauvegarde de leurs justes droits vis-à-vis des entrepreneurs et des propriétaires des moyens de production »[55]. Il souligne plus loin que la fonction principale de ces syndicats est la défense des intérêts existentiels des travailleurs dans tous les secteurs où leurs droits sont en cause.
L’un des moyens utilisés par les syndicats pour promouvoir les droits de leurs membres est la grève. C’est l’arrêt du travail conçu comme une sorte d’ultimatum adressée aux organismes et aux employeurs. Cette méthode est reconnue par la D.S.E. lorsqu’elle est justifiée et bien orientée. En effet, les actions syndicales ont très souvent fait l’objet d’abus et de manipulations, voyant ainsi leur finalité détournée à des fins politiques. Nous avons encore en mémoire les émeutes de février dernier qui ont eu lieu au Cameroun. Emeutes qui ont fait suite à une manifestation syndicale, qui s’est transformée en un instrument politique. Sur ce point, l’Eglise à travers sa Doctrine Sociale déclare que le rôle des syndicats n’est pas de faire de la politique car « ils n’ont pas un caractère de partis politiques. Faute de quoi, ils ne défendraient plus les justes droits des travailleurs, mais au contraire, deviennent un instrument pour d’autres buts »[56].
En bref, les organisations syndicales ont le devoir d’influencer le pouvoir politique, afin de le sensibiliser dûment aux problèmes du travail et de l’inciter à favoriser la mise en œuvre des droits des travailleurs. Toutefois, l’action syndicale doit toujours tenir compte des limites imposées par la situation économique de l’entreprise ou du pays. Car, les entreprises « si larges que soient leurs dimensions (…) demeurent toutefois inscrites vitalement dans le contexte économique et social de leur communauté politique »[57].
V. Evaluation critique
Face aux problèmes de la dignité du travail humain et de la condition du travailleur, le message de la D.S.E. se révèle être clair pour tous les cœurs ouverts et disposés à l’accueillir. Néanmoins, il court le danger d’une mauvaise interprétation. En effet, la mise en évidence de l’homme comme valeur suprême du travail pourrait entraîner une relégation de la valeur du travail au second rang. Ce qui entrainerait de la désinvolture chez quelques uns, par conséquent la réduction de la production et ainsi la régression de la société. Il est donc important de comprendre le message de la D.S.E. comme une exhortation au travail et non comme une invitation à la léthargie.
Conclusion
Arrivés au terme de notre réflexion qui a porté sur la dignité du travail humain, il en résulte que le travail est une activité sociale propre à l’homme, un actus personae qui d’une part l’aide à soumettre la terre, la dominer rationnellement, et d’autre part l’aide à se réaliser en tant que sujet autonome, libre, capable de créer, de produire et de s’affirmer. En effet, la dignité du travail humain repose sur la considération de l’homme comme sujet et non comme objet du travail. C’est dans cette perspective que la D.S.E. a orienté son action en mettant en relief la place prééminente de la personne par rapport au travail : « Le travail est avant tout pour l’homme et non l’homme pour le travail »[58]. D’où cet appel à promouvoir le respect des droits et devoirs du travailleur, la lutte contre le chômage, le travail des enfants, la discrimination sociale qui s’imposent de manière impérative à toute conscience humaine. Les institutions nationales, internationales et les syndicats œuvrent dans cette voie. Le vrai travail, le travail noble est celui qui permet à l’homme de se réaliser dans toute sa dignité.

BIBLIOGRAHIE

I. Sources :
- Bible de Jérusalem
- Collection, Petit Larousse illustré, paris, 1996.
- Collection, Des Guides pratiques, philosophie Terminales A B, t. II, Paris, Bordas, 1974.
- DUROZOI G., ROUSSEL A., Dictionnaire de Philosophie, Paris, Nathan, 2002.
- RUSS J. & BADAL-LEGUIL C., Dictionnaire de philosophie, Paris, Bordas, 2004.
- VERGEZ A., HUISMAN D., Nouvel abrégé de philosophie classes Terminales A, B, C, D, E, Paris, Fernand Nathan, 1974.
- Le petit Larousse, Dictionnaire Encyclopédique, Paris, 1997
- MARX K., Le Capital, Livre I, trad. Roy revue par Rebel, in œuvres Pléiades N.R.F., t.I
- GUERRY Mgr, La doctrine sociale de l’Eglise, son actualité, ses dimensions, son rayonnement, Paris presse, 2è trad., 1959.

II. Documents de l’Église :
* Conseil Pontifical Justice et Paix, Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, Paris, Bayard, 2005
* Catéchisme de L'Eglise Catholique, Librairie éditrice vaticane, Paris, 1998
*Jean Paul II, Centesimus Annus (100 ans après), 1991
* Jean Paul II, Laborem Exercens (Le travail humain), 1981.
* Vatican II, Gaudium et Spes (l'Eglise dans le monde de ce temps), 1965.
* Jean XXIII, Mater et Magistra (Christianisme et progrès social), 1961.
* Léon XIII, Rerum Novarum (Les choses nouvelles), 1891.
- PIE XII, Message de Noël 1952, in Théo l’encyclopédie catholique pour tous, Paris, Fayard, 1996.
- PIE XII, Allocution aux agriculteurs le 16 novembre 1946.
- JEAN PAUL II, Message pour la journée mondiale de la paix, 1996.
Table des matières

TABLE DES SIGLES ET ABREVIATIONS. 2
INTRODUCTION.. 3
I. Approche conceptuelle et biblique du travail.. 3
I.1. Conception philosophique du travail humain. 3
I.2. Conception de la D.S.E. 3
I.2.1. L’enseignement social de l’Eglise. 3
I.2.2. Fondements bibliques. 4
II. Dignité du travail humain.. 5
II.1. Dimension objective et subjective du travail 5
II.1.1. Dimension objective du travail 5
II.1.2. Dimension subjective. 6
II.2. Droits et devoirs du travailleur. 6
II.2.1. Le droit au travail et les droits du travailleur. 6
II.2.2. Les devoirs du travailleur. 7
II.3. L’importance du travail 8
II.3.1. Travail et survie. 8
II.3.2. Travail et propriété privée. 8
II.3.3. Travail et promotion sociale. 9
II.3.4. Travail et loisir. 9
III. Problèmes du travail humain et apports de la D.S.E. 9
III.1. Le chômage. 9
III.2. Le problème du travail des enfants. 10
III.3. La discrimination sociale. 11
III.3.1. Différentes discriminations sociales. 11
III.3.2. Apport de la D.S.E. face à ces différentes discriminations. 12
IV. Rôle de l’état et du syndicat par rapport au travail.. 13
IV.1. L’Etat. 13
IV.2. Les syndicats. 14
V. Evaluation critique. 15
Conclusion. 16
BIBLIOGRAHIE.. 17

[1] G. DUROZOI & A. ROUSSEL, Dictionnaire de Philosophie, Paris, Nathan, 2002, p.388.
[2] K. MARX, Le Capital, Livre I, trad. Roy revue par Rebel, in œuvres Pléiades N.R.F., t.I, 1864, p.734.
[3] La loi naturelle c’est celle qui a été inscrite par le Créateur dans l’être même de l’homme, dans sa nature animale et raisonnable, dont son intelligence prend conscience. Quant à la Révélation il faut entendre Parole de Dieu et Tradition.
[4] L.E., 9 §3.
[5] R.N., 32.
[6] « Par son travail, l’homme assure habituellement sa subsistance et celle de sa famille, s’associe à ses frères et leur rend service, peut pratiquer une vraie charité et coopérer à l’achèvement de la création divine » G.S., 67 §2.
[7] Pie XII, Allocution aux agriculteurs le 16 novembre 1946
[8] L.E., 4 §1.
[9] Gn 2, 15
[10] Ex 20, 9
[11] Gn 3, 19
[12] Mt 11, 28
[13] Jn 6, 27
[14] Ep 4, 28
[15] Mc 8, 36
[16] 1 Th 5, 12-13
[17] Ap 14, 13
[18] L’Ancien Testament présente Dieu comme le Créateur tout puissant cf. Gn 2, 2
[19] Cf. G. CANGUILHEM, in coll. Des Guides pratiques, philosophie Terminales A B, t. II, Paris, Bordas, 1974, p. 27.
[20] Cf. 2 Th 3, 6-12
[21] MOUNIER, in A. VERGEZ, D. HUISMAN, Nouvel abrégé de philosophie classes Terminales A, B, C, D, E, Paris, Fernand Nathan, 1974, p. 154.
[22] C.D.S.E., N°271.
[23] Ibid., N°288.
[24] G.S., N°26.
[25] Cf. Mt 10, 10
[26] L.E., N°19 §2.
[27] Mgr. GUERRY, La doctrine sociale de l’Eglise, son actualité, ses dimensions, son rayonnement, Paris, bonne presse, 2è trad., 1959, p. 67.
[28] Cf. Gn 3, 19
[29] Cf. 2 Th 3, 10
[30] AMBROISE (saint), De obitu Valentiniani consolation, 62: PL 16, 1438, in C.D.S.E., op. cit. N°265.
[31] Cf. Mt 25, 23
[32] L.E., N°10.
[33] Ibid., N°14.
[34] Ibid., N°14.
[35] L.E., N°18 §1.
[36] C.E.C., N°2436.
[37] C.D.S.E., N°289.
[38] Ibid., N°18.
[39] Cf. C.D.S.E., N°296.
[40] JEAN PAUL II, Message pour la journée mondiale de la paix, 1996.
[41] C.D.S.E., N°296.
[42] R.N., N°11.
[43] Le petit Larousse, Dictionnaire Encyclopédique, Paris, Larousse, 1997, pp. 345-346.
[44] L.E., N°21 §3.
[45] Ibid., N°22.
[46] L.E. N°23 §3.
[47] Ibid., N°19 §5.
[48] J. RUSS & C. BADAL-LEGUIL, Dictionnaire de philosophie, Paris, Bordas, 2004, p. 134.
[49] C.A., N°48.
[50] M.M., N°21-22.
[51] Collection, Petit Larousse illustré, Paris, 1996, p. 981.
[52] PIE XII, « Message de Noël 1952 », in Théo l’encyclopédie catholique pour tous, Paris, Fayard, 1996, p. 836.
[53] M.M., op. cit. 98.
[54] G.S., N°68 §2.
[55] L.E., N°20 §2.
[56] C.D.S.E., op. cit., N°307.
[57] M.M., op.cit., N°99.
[58] L.E., N°6 §6.

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