domingo, 3 de enero de 2010

EDUCATION EN AMERIQUE LATINE

PLAN
INTRODUCTION
I. L’EDUCATION EN AMERIQUE LATINE DU XVIème AU XVIIIème SIECLE
I.1. Histoire de l’éducation en Amérique latine au XVIème siècle
I.2. Du XVIIème au XVIIIème siècle : La réforme des illustres
II. HISTOIRE DE L’EDUCATION EN AMERIQUE LATINE DU XIXème AU XXème SIECLE
II.1. L’hégémonie oligarchico-libérale (1880-1920)
II.1.1. Le positivisme pédagogique
II.2. Le nationalisme populaire ou « populisme » latino américain
II.2.1. La dissonance pédagogique : l’antipositivisme
II.2.2. Les réalisations pédagogiques du rationalisme populaire
II.2.2.1. Les réalisations pédagogiques de la révolution cubaine
II.2.2.2. L’idéologie pédagogique du réformisme modernisant
II.3. Education et développement
II.4. La réforme éducative entreprise par les militaires dans les années 60
II.4.1. Le contexte générale de la réforme
II.4.2. La réforme éducative péruvienne
II.4.3. La réforme éducative panaméenne
II.5. La militarisation de la société civile et ses conséquences sur l’éducation
II.5.1. L’échec des nationalismes populaires
II.5.2. Conséquence de la militarisation sur l’éducation
CONCLUSION

INTRODUCTION
L’Amérique latine est un sous-continent avec des pays aussi bien que des peuples aux cultures très variées. Etudier l’histoire, encore plus l’histoire de l’éducation, dans un tel cadre, consiste à s’enfoncer dans les méandres d’un conglomérat social, économique et politique hétérogène. C’est ce à quoi nous invite, fort bien notre recherche.
Il s’agit pour nous d’étudier l’histoire de l’éducation en Amérique latine. Les documents à notre disposition la situent du XVIème au XXème siècle. Il convient, avant tout, de signaler que l’histoire n’est pas linéaire ; loin de nous donner donc quelque prétention à vouloir y rechercher un ordre chronologique rigoureux. Au contraire, nous serons amenés à faire de grands sauts dans le temps pour retrouver les périodes significatives, c’est-à-dire celles qui ont marqué le domaine de notre étude. Nous veillerons autant que possibles à ressortir les agents, le sujet, la finalité de l’éducation ainsi que la méthode éducative correspondant à chaque période.
Dans la première partie qui va du XVIème au XVIIIème siècle, nous voulons montrer que l’éducation en Amérique latine, pendant la colonisation et même après les indépendances, était fortement liée à l’Espagne. Ce furent des religieux, tous originaires de la métropole qui ont commencé l’éducation dans les colonies. Même si la finalité n’était pas neutre, elle a tout de même évolué sous l’instigation des hommes illustres d’Espagne. Ce lien fera d’ailleurs dire à Horacio Solari que : L’Espagne « ne quitta pas ses colonies ; elle leur donna tout ce qu’elle avait : sa langue, sa religion, ses coutumes, ses lois et, en matière d’éducation, ses formes de pensées, ses genres d’études, ses méthodes d’enseignement »[1].
La deuxième partie de notre travail s’étend du XIXème au XXème siècle. C’est le moment de la genèse des Etats-nations. Ils ont connu des évolutions tumultueuses, avec évidemment des incidences sur l’éducation. C’est pourquoi cette partie se chargera de montrer l’impact que les différents régimes qui se sont succédés à la tête des Etats latino-américains ont eu sur l’éducation. Nous ferons ainsi un parcours qui s’étendra de l’oligarchie libérale au militarisme, en passant par le nationalisme populaire. La réussite de Cuba, et sa métamorphose en révolution socialiste, retiendront notre attention.

III. L’EDUCATION EN AMERIQUE LATINE DU XVIème AU XVIIIème SIECLE
I.1. Histoire de l’éducation en Amérique latine au XVIème siècle
La première trace historique de l’éducation en Amérique latine se trouve dans un décret du roi d’Espagne datant de 1503 et ordonnant de « bâtir une maison ou de réunir deux fois par jours les enfants de chaque population et que le prêtre leur apprenne à lire, à écrire, et la doctrine chrétienne avec beaucoup de charité »[2]. Ce texte nous montre la volonté affichée par le roi d’Espagne de traiter l’indigène en toute dignité.
Au XVIème siècle, l’éducation en Amérique latine trouvait sa finalité dans l’évangélisation, c’est-à-dire la transmission de la foi chrétienne. Les agents de cette œuvre éducative étaient presque exclusivement des religieux : franciscains, dominicains, augustins, betlemites et jésuites.
Au début, ils allaient vers les conquérants pour les instruire dans la foi chrétienne et, en parallèle, ils donnaient des enseignements élémentaires et des rudiments professionnels aux indigènes. En 1526, ces religieux créèrent l’un des premiers collèges d’Amérique latine. Ce fut le collège de Saint-François au Mexique. Ici, les enseignements allaient de pair avec la catéchèse. Deux ans après, le collège San Juan de Latran était créé à Mexico. Une imprimerie y fut installée en 1539 et une université commença à y fonctionner en 1553. Ceci se répandit dans d’autres pays.
Ainsi par exemple, pour la formation des jeunes indiens, l’évêque Zumarraga fonda en 1536 le collège de Santa Cruz à Tlaltelolco.
En 1538, des études générales données à Santo Domingo reçurent le caractère d’université. Les nombreux collèges existants, les universités en expansion et le développement des écoles primaires ont permis un haut degré de culture en Amérique latine au XVIème siècle. C’est pourquoi le professeur Pablo Martinez Arroya dira lors de la célébration du quatrième centenaire de l’Université de Mexico :
La Nouvelle-Espagne du XVIème siècle demeura beaucoup moins imperméable que ce que l’on suppose souvent à l’égard de la culture générale européenne ; et les listes des livres envoyés au Nouveau Monde ou repris par l’inquisition montrent une largeur d’intérêts intellectuels dans les colonies, qui peut être qualifiée presque de surprenante, tandis qu’ils témoignent que, pour les ecclésiastiques, la religion était une question d’intérêt vital mais pas exclusif pour leurs lectures[3].
Cette citation nous montre l’intérêt que les latino-américains portaient déjà à la culture intellectuelle à cette époque qui coïncidait avec la colonisation. Le professeur Arroya vient par là remettre les pendules à l’heure, au moment où s’affrontent deux attitudes opposées relatives à l’œuvre civilisatrice de l’Espagne en Amérique. Ainsi, selon l’angle d’observation on est triomphaliste ou négativiste ; certains estimant que l’Espagne donna tout ce qu’elle avait à ses colonies, tandis que d’autres dénoncent le manque quasi-total d’écoles dans les colonies.
Toutefois, à la fin du XVIème siècle, le nombre de maîtres séculiers en fonction dans la Nouvelle-Espagne a permis et obligé la création de la corporation des enseignants, quarante ans avant la métropole. Une ordonnance signée du vice-roi en 1601 exigeait l’institution des examens ; elle fixait les connaissances nécessaires et les conditions exigibles pour obtenir l’autorisation d’ouvrir une école. Cette ordonnance révèle aussi l’existence de beaucoup d’Amigas (amies), dont une partie apprenait à lire aux enfants.

I.2. Du XVIIème au XVIIIème siècle : La réforme des illustres
Cette période est encadrée par deux événements pédagogiques importants : Le début des publications du Père Feijoo et la fermeture « l’Institut royal » militaire pestalozzien. La reforme éducative, qui s’y déroule, porte sur les plans doctrinaux et pragmatiques. Elle travaillera à réviser l’éducation dans son ensemble. Autrement dit, cette réforme va revoir, non seulement le contenu théorique de l’enseignement, mais aussi les matières de nature pratique. La plupart des intellectuels de cette époque furent de grands pédagogues et des hommes politiques. Entre autres gens illustres réformateurs, nous pouvons nommer : Feijoo et Sarmiento, parce qu’ils ont eu « une sérieuse réponse pédagogique aux problèmes de la société espagnole»[4].
Benito Jeronimo Feijoo (1677-1764) publia de 1726 à 1760 : Théâtre critique universel et Lettres érudites et curieuses. Dans ce livre, il s’attaque farouchement à tout ce qui minait l’enseignement et la culture. C’est ainsi qu’il décèle et condamne la médiocrité comme étant une insuffisance et une imperfection de la société entière. Il résume sa pensée dans cette déclaration ; « Moi, citoyen libre de la République, ni esclave d’Aristote ni allié des ennemis, j’écouterais toujours ce que l’expérience et la raison me dicteront, de préférence à toute autorité privée »[5]. C’est une déclaration citoyenne et provocatrice, qui aura son accomplissement dans l’objectif de reforme qu’il s’est fixé.
Il envisageait la réforme des études universitaires, en la soustrayant de l’emprise de la scolastique. Pour ce faire, il se proposa de changer l’étude qu’on faisait des simulas (principes logiques), la logique, la métaphysique ainsi que la physique qu’on traitait métaphysiquement. Il défendit l’importance et le développement des sciences physiques naturelles. Au vu du primat qu’il accorde à l’expérience et de la critique qu’il fait à Descartes, on le place sur une ligne empirique, assez proche du Novun organum de Bacon et avec de nettes réminiscences de Vives.
L’œuvre de Feijoo peut être qualifiée d’essai d’une pédagogie rationnelle qui prétendit configurer la société selon la pensée philosophique, en exigeant de chaque homme une grande rigueur et l’honnêteté intellectuelle.
Fray Martin Sarmiento, de son vrai nom Pedro José Gasende de Balboa, est « le plus grand représentant du réalisme pédagogique à la façon de Comenius»[6]. A coté des divers écrits sur les matières : linguistique, botanique, histoire ou littérature, Sarmiento abonda le plus sur l’éducation, en « se préoccupant particulièrement du perfectionnement des études, de la reforme éducative du pays, dans laquelle il voyait la solution à la décadence existante »[7].
Sa pédagogique s’appuie sur deux principes fondamentaux : Le principe de la gradation rigoureuse de l’enseignement, qui prône le passage du concret à l’abstrait, du matériel au spirituel ; et le principe de la dénomination précise et corrélative en langue vernaculaire des objets que l’on veut identifier. Ce deuxième principe donne l’importance aux langues locales qui, en raison de leur nécessité pédagogique, permettront aux citoyens de traduire la connaissance conformément à leur schème culturelle de compréhension. Il se donna à reformer la structure scolaire. C’est ainsi qu’il délimita et exigea la fiche scolaire sur laquelle figurent tous les renseignements sur l’élevé : Les maladies, les vaccins, le développement intellectuel et bien d’autres indications.
Si la première démarche de gradation se concrétisa sur l’intuition, « il jugea que la vraie clé des sciences et même de la logique se trouvait dans l’arithmétique et dans la géométrie »[8]. Son souci de la méthode va ensemble avec un intérêt pour la formation et la sélection des enseignants. Il exigeait beaucoup de l’enseignant. Pour lui, ce dernier doit maîtriser ce qu’il donne aux enfants. Et il va même jusqu’à lui attribuer la responsabilité de l’échec de l’élève. Au demeurant, c’est manquer de charité que de se soustraire à la déontologie de l’éducation, car dit-il : « C’est une œuvre de miséricorde d’enseigner à celui qui ne sait pas. Que celui qui ne sait pas enseigner entre dans ce métier pour avoir à manger n’est pas une œuvre de miséricorde, mais d’injustice et de bavardage insatisfait »[9].
IV. HISTOIRE DE L’EDUCATION EN AMERIQUE LATINE DU XIXème AU XXème SIECLE
Nous voulons étudier dans cette partie l’évolution des conceptions et des réalisations pédagogiques en Amériques Latine. Elle se situe dans un cadre historico-culturel qui explique et donne sens à ces conceptions et réalisations.
Cependant, cette approche suppose, la prise en considération des conditions historiques et super structurelles qui ont fait, non seulement émerger, mais aussi freiner les conceptions pédagogiques et les réalisations éducatives. Celles -ci sont liées directement à la formation, à l’évolution et aux luttes de différentes classes et forces sociales.
II.1. L’hégémonie oligarchico-libérale (1880-1920)
La période des années 1810-1825 marque l’accession à l’indépendance des pays sud-américains. A ce moment, la plupart des anciennes colonies connaissaient des guerres civiles ayant pris fin avec le triomphe de la fraction de l’oligarchie terrienne et marchande, liée au marché externe (seconde moitié du XIXème S). Les intérêts de cette classe se sont exprimés dans un nouveau projet de développement d’une économie exportatrice de matières premières en concordance avec l’expansion du capitalisme international. C’est ainsi que ces formations sociales s’incorporent, à la fin du siècle, au système de division internationale du travail avec les fonctions précises : Production et exportation des matières premières et alimentaires pour les centres dominants de l’économie industrielle, marché pour les produits industriels et zone d’investissement pour les capitales des centres[10]. Par conséquent, les pays et les régions qui ont respecté la mise en application de cette division du travail ont connu un essor considérable. Dans cette perspective, on remarque également comme résultat « une complexité structurelle et un développement inégal et combiné qui se manifestent aussi bien sur le plan économique que si les plan social et culturel et qui durent jusqu’à nos jours »[11].
A la fin du XIXème siècle, les jeunes républiques latino américaines se sont transformées en Etats libéraux, à l’image de l’Amérique du nord et de l’Europe. Ils avaient adopté presqu’en totalité cette idéologie. Tout laissait croire qu’ils visaient l’« européanisation ». Ce libéralisme, surtout économique, visait une protection des intérêts des élites qui coïncidaient avec le développement du capitalisme au niveau international.
Tous ces régimes libéraux avaient adopté la devise de Bacon : « Ordre et progrès ». Le progrès national ici signifie fondamentalement la possibilité, pour les élites, d’atteindre les modèles de consommation et d’éducation des pays développés d’Europe et des Etats-Unis d’Amérique. Ceci donna lieu à des décisions dictatoriales, par exemple l’abolition de la propriété communautaire et le système agraire indigène. Dès lors, « le démembrement des collectivités paysannes […] conduisit, par les implications sociales, à aggraver le problème rural. L’année 1910 marque le début de la révolution et 80% des pays manquaient de terres et devaient travailler comme « peones » c'est-à-dire ouvriers agricoles, dans les grandes propriétés »[12].
L’oligarchie libérale a produit des intellectuels au sein desquels on recrute les grandes figures de la pensée libérale latino américaine. C’est ainsi que ces régimes ont pu conserver le monopole culturel et idéologique jusque dans les moments de crise politique et économique.
L’influence des intellectuels se situe au niveau de la superstructure hégémonique (système éducatif, presse, édition, etc.). L’impact des intellectuels dans l’élaboration des théories oligarchiques constituent encore aujourd’hui une barrière difficile à franchir pour les nouveaux agents du changement social. Ils étaient chargés d’écrire l’histoire des pays latino américains, de diffuser et faire intérioriser cette histoire à travers le système éducatif. Ils ont offert aux nouvelles générations une image mystifiée d’unité nationale, « l’image d’une « patrie » forgée par un patriciat lucide progressiste, obscurcissant le caractère historique et structurel de sa dépendance »[13]. L’application de l’idéologie oligarchique libérale a servi à dissimuler l’histoire entière des luttes des forces sociales et des classes, les profondes inégalités, l’exploitation des grandes majorités.
Cependant, elle a servi de terreau pour la critique du pouvoir oligarchique. Ces critiques ont laissé intactes les racines structurelles, économiques et sociales. C’est alors que sont nés des mouvements civilistes revendicatifs[14] qui prétendirent amplifier la participation de tous et de chacun dans les affaires politiques, par l’intermédiaire du vote.
Finalement, ces mouvements sont tombés à cause de leur incapacité à formuler un nouveau modèle de développement économique, social et éducatif. C’est dans cette perspective que surgit « Réforme universitaire de 1918 » qui, à partir de Cordoba en Argentine, se diffusa dans toute l’Amérique latine et fut un mouvement typiquement anti –oligarchique. On luttait contre la coparticipation des étudiants à la gestion universitaire et pour l’autonomie de l’université. La résultante de ces révoltes et soulèvements a été la transformation du mouvement estudiantin en une école politique.
Durant cette période, la révolution mexicaine s’est distinguée en étant « l’unique mouvement de masses qui liquide sur son passage la vieille oligarchie agraire et réalise en même temps une révolution agraire .Elle a établi un Etat moderne fondé sur une constitution démocratique et introduit des transformations importantes dans les relations de production à la campagne et en ville ».[15] Malheureusement, cette révolution mexicaine ne réussit pas à libérer les masses paysannes de la misère, de l’exploitation et de l’analphabétisme. Cependant, la nouvelle bourgeoisie, étroitement liée à l’appareil étatique, a bénéficié principalement la « révolution institutionnalisée ».
II.1.1. Le positivisme pédagogique
Le positivisme pédagogique a dominé dans la période des années 1880-1920. Il apparaissait comme une voie efficace, convenant aux nécessités de l’ordre politique et de la liberté économique des jeunes nations latino-américaine ou, tout au moins, de leurs dirigeants. L’ordre politique et la liberté économique étaient absolument nécessaires pour obtenir le progrès.
Ce courant positiviste était un amalgame de scientisme, de libéralisme, et d’évolutionnisme. Sur le plan pédagogique, il se préoccupait moins des finalités de l’éducation que des aspects psychologiques, biologiques et méthodologiques. Dans son sillage, beaucoup de tendances et diverses écoles sont nées. Heureusement, toutes n’ont pas sombré dans le libéralisme rétrograde et antipopulaire.
Il nous paraît important d’énumérer quelques uns des auteurs pédagogues qui ont ouvert la voie à un libéralisme avancé. Le pédagogue argentin Victor Mercante fut le premier à dénoncer, en 1893, le caractère étranger de l’éducation de son époque. Celle-ci était accusée de favoriser la formation des littéraires et des rhéteurs, au lieu de s’intéresser à la réalité latino américaine. Ainsi, l’éducation était destinée à préserver les intérêts de la classe dominante.
En conséquence, le modèle éducatif a été mis en cause par des représentants du prolétariat urbain et de la paysannerie dans les pays comme Mexique, Chili et Argentine. Ceux-ci se sont insurgés contre certaines mystifications du modèle libéral positiviste. Ils voulaient, par exemple, démontrer que les bénéfices de l’instruction primaires, proclamés par le libéralisme, n’arrivaient pas aux classes majoritaires qui vivaient dans la misère. Et ici, la misère était à combattre en tant qu’ennemi premier de l’enseignement populaire.
Même l’accession au pouvoir des partis politiques représentatifs de la petite bourgeoisie n’a pas influencé le système éducatif créé par les gouvernements oligarchiques. Ce ne sera qu’en 1910 que le Mexique parviendra à le modifier.
II.2. Le nationalisme populaire ou « populisme » latino américain
Le nationalisme populaire est une expérience sociopolitique singulière en Amérique latine. C’est un mouvement qui a été porté par des figures historiques remarquables (à l’instar de Vargas au Brésil, Silez Zuarzo en Bolvie et Eliécer Gaitan en Colombie dans les années 40) et qui a connu un essor considérable dans la plupart des pays, à quelques différences prêts.
Par ailleurs, la crise de l’impérialisme européen et nord américain de 1930 met en crise l’hégémonie oligarchico-libérale. Celle-ci, dépendant de celle-là, ne pouvait pas résister au mouvement entrainé par la chute du premier. C’est ainsi que de nouveau rapports de force s’établir entre les différentes classes sociales. Le déclin de l’oligarchie libérale offrait des possibilités « pour la mise en pratique d’un nouveau projet économique industrialiste à caractère autonome, pour l’ascension de nouvelles classes au pouvoir, les classes populaires se convertirent en la principale source du pouvoir de l’Etat bourgeois »[16]
Enfin, la chute des régimes populistes marque, pour l’Amérique latine, l’échec d’une politique de développement autonome et distributive et, en même temps, l’aggravation des conflits entre les classes sociales. Pour remédier à cette situation, il fallait recourir aux discours populistes caractérisés par l’industrialisation, la justice sociale et le rejet des valeurs traditionnelles de l’oligarchie.
II.2.1. La dissonance pédagogique : l’antipositivisme
La crise financière de 1929 a eu des profondes répercussions en Amérique Latine. A cette époque, « les métropoles offraient non seulement le spectacle de destruction de leurs forces productrices mais aussi celui d’une catastrophe sociale et d’une profonde crise politique »[17]. L’éducation a été touchée dans sa profondeur dans la mesure où elle a été influencée par les idées fascistes, nazistes et phalangistes.
Sous l’influence des philosophes tels que Detchely, Scheler, Spranger, Litt, Messer et certains éducateurs de tendance nazie et fasciste, l’éducation s’est fondée sur une idéologie nourrie par un humanisme abstrait. Certains pédagogues de l’Amérique Latine, qui ont baigné dans ces idées, sont devenus des « ’intellectuels traditionnels » au lieu d’être des intellectuels au service du changement social.
Le courant culturaliste et spiritualiste à servi de base pour justifier la structure classiciste traditionnelle de l’éducation. Il a renforcé dans ce sens le divorce entre la vie et l’école, entre l’éducation et la réalité sociale, entre la formation de l’intellectuel et le travail manuel.
II.2.2. Les réalisations pédagogiques du rationalisme populaire
Au Mexique, le régime de Lazaro Cardenas (1934-1940) a développé des activités très intenses qui eurent comme objectif l’alphabétisation des adultes, l’intégration des masses dans la vie culturelle du pays à travers les syndicats, les coopératives, les organisations et biens d’autres. C’est dans cet élan que l’école a été transformée en un centre dans lequel se développent et s’orientent les intérêts de la communauté, à savoir, la santé, la production, le développement des voies de communication[18].
De toute évidence, les aspirations éducatives de la révolution mexicaine, menèrent à bien une lutte gigantesque contre l’analphabétisme et pour l’élévation de la culture populaire. C’est grâce à l’initiative de Vasconcelos que fut créé le secrétariat de l’éducation publique. Ce genre de pédagogie avait une grande passion et un esprit à caractère missionnaire qui se transféraient très rapidement aux instituteurs et aux masses ouvriers rurales. C’est dans cette logique que le ministre Vasconcelos a commencé sa gigantesque tâche de promotion de l’éducation et de la culture dans tout le pays. Il mettait l’accent sur l’éducation rurale. Celle-ci était un noyau aux activités multiples, toutes tournées vers le service de la vie dans les communautés indigènes.
L’université se convertit en un centre de mobilisation culturelle, idéologique, et de création d’une nouvelle culture. « La transformation culturelle mit l’accent sur le sentiment nationaliste et la tradition révolutionnaire comme éléments fondamentaux d’un mythe unique capable d’intégrer les différentes classes et ethnies et de mobiliser les énergies populaires »[19].
Au Brésil, le gouvernement populiste de Getulia Vargas (1930-1945) et (1951-1954) « donne une grande impulsion à l’éducation »[20]. Le nombre des écoles en 1945 était le double qu’en 1930. L’éducation au niveau moyen commença à se développer à partir de 1935. La formation des instituteurs, surtout par l’action des Etats, prit une grande expansion et le nombre des maîtres crût considérablement.
Quant à l’Argentine, le régime péroniste (1943-1955) réalisa une action de grande envergure dans l’éducation. Cette action lui permit de rendre populaire le système éducatif, spécialement dans l’enseignement secondaire. Un grand nombre de jeunes, provenant de la classe ouvrière, accéda à l’enseignement secondaire et spécialement à l’enseignement technique. L’exode rural fut très remarquable, car c’est dans les villes que la population trouvait les possibilités éducatives qui lui faisaient défaut dans les zones rurales. Durant le régime péroniste, on constate le profond divorce entre les élites intellectuelles, l’université, le mouvement étudiant, les syndicats de professeurs et les luttes populaires[21].
Au Cuba, le processus de transformations économiques et sociales fut accompagné de la volonté délibérée de transformer la conscience sociale. Le processus de transformation a montré qu’il y a un parallèle irrévocable entre les changements structurels et superstructurels. Dans ce contexte, on accorda une priorité fondamentale au développement de la conscience du travailleur. On perçut un grand optimisme pédagogique. « Les hommes, par leur éducation, sont capables de modifier leur conduite. Eduquer signifie développer la conscience et ce développement constitue le motel fondamental de la construction de la société socialiste »[22].
II.2.2.1. Les réalisations pédagogiques de la révolution cubaine
A partir des changements opérés en matière d’éducation au Cuba, en 1959, Mialaret nous laisse entrevoir des réalisations les plus importantes. Ainsi, il nous fait savoir que les effectifs de l’éducation primaire passèrent de 1030000 en 1960 à 1530400 en 1970 et à 1806000 en 1975 ; ceux de l’éducation secondaire de 122000 en 1960 à 2424000 en 1970 à 534000 en 1976 ; ceux de l’éducation supérieure de 19900 en 1960 à 26300 en 1970 et 82700 en 1975.[23] A la fin de la campagne nationale d’alphabétisation, Fidel Castro a pu affirmer au terme de cette campagne que « quatre siècles et demi d’ignorance s’étaient écroulés »[24]. Il a raison de faire une telle déclaration car les effectifs du niveau moyen ont quadruplé entre 1960 et 1970. Dans le quinquennat 1970-1975, l’éducation technique augmenta d’un taux annuel de plus 31%t pour les deux sexes.
La combinaison de l’étude et du travail est aujourd’hui une réalité dans tout le pays : « Les façons dont se combinent les deux éléments dans la formation des nouvelles générations sont diverses dans les différents niveaux du système, mais dans tous il y a un trait commun : le caractère systématique de cette combinaison »[25].
Durant la décennie 60, une éducation parallèle se développa avec trois programmes principaux : Education du mouvement juvénile, éducation extrascolaire et éducation des adultes. Celle-ci visait à intégrer l’éducation et le travail éducatif. Deux projets se sont développés avec cette finalité « l’école à la campagne »(1965) et « l’école dans la campagne » (1972-1973). Ces écoles avaient comme objectif, non seulement de faire disparaître les différences entre le travail manuel et le travail intellectuel, mais aussi de stimuler l’amour du travail et former des étudiants producteurs, ayant une attitude positive face à l’activité productrice et respectant la propriété sociale.
Pour s’adapter aux exigences du développement national, on a introduit à l’école technique une coordination du travail académique avec le travail pratique[26]. L’œuvre éducative de la révolution fut d’une remarquable grandeur. C’est pourquoi, Fidel asserte que « le pays s’était transformé en une immense, en une gigantesque école »[27].
II.2.2.2. L’idéologie pédagogique du réformisme modernisant
Après la chute du nationalisme populaire, les régimes développementistes modernisateurs ont voulu concilier divers intérêts économiques. Leur modèle de développement prétendait articuler une politique tendant à équilibrer les niveaux de protection pour le capital national et pour le capital monopoliste.
Les classes populaires donnèrent momentanément leur consentement parce que le nouveau mode d’accumulation capitaliste impliquait une augmentation de l’exploitation du travail[28]. C’est ainsi que, favorisés par la légalité développementiste, le mouvement ouvrier et le mouvement paysan ont repris ce combat. C’est dans cette logique que le réformisme pédagogique a dû se constituer comme un aspect presque obligatoire du développementisme modernisateur. L’idéologie développementiste suppose que le développement économique transforme plus ou moins, inévitablement, la société traditionnelle en société moderne.
Pour réussir cette utopie, l’optimisme pédagogique s’inspire de l’optimisme développementiste. L’éducation doit être perçue comme un facteur essentiel du changement social, le canal de mobilité par excellence. Le langage de rationalité économique et du technicisme, qui accompagne parfois le langage de la justice sociale, réparait au niveau de l’idéologie pédagogique. L’école se visualise ici comme une entreprise économique.
II.3. Education et développement
Durant cette période, les études sur l’économie de l’éducation et, particulièrement, les études sur les ressources humaines, prennent une grande importance. Une forte tendance économiste de l’éducation se dessine. Ici, l’éducation apparaît comme un simple moyen de production de ressources humaines pour le développement, comme un facteur productif. L’éducation n’est pas seulement l’agent du savoir, mais elle est le facteur du développement. Tous les pays de l’Amérique Latine ont créé des bureaux de planification pour la réussite de ce gigantesque projet éducatif.
Au niveau supérieur, on observe une croissance spectaculaire des effectifs universitaires. De 1956 à 1965, le pourcentage de croissance des effectifs est de 92,3%. La structure universitaire commençait à se transformer. Les facultés et chaires tendaient à disparaître. L’université modernisante commençait à acquérir les traits d’une entreprise capitaliste efficace, formatrice des ressources humaines.
II.4. La réforme éducative entreprise par les militaires dans les années 60
II.4.1. Le contexte général de la réforme
A la fin des années 60, un militarisme progressiste et nationaliste remplaça le réformisme modernisateur. C’était un militarisme réactionnaire, répressif et pro-impérialiste. Ces régimes militaires réformateurs se proposeront de lutter, non seulement pour le développement économique et social, mais aussi pour l’obtention de l’indépendance de leurs pays. Ils se diront agir au nom et pour l’intérêt du peuple. L’idéologie sous-tendant leur action est celle d’une « voie intermédiaire, ni capitaliste ni communiste […] qui porte la nation au-dessus des partis, des classes et des idéologies traditionnelles »[29]. C’est la voie qu’emprunteront des pays comme le Pérou, le Panama et la Bolivie.
Dans ces pays, l’armée se présentait comme la seule force coercitive en situation de crise. Elle pouvait imposer la discipline aux classes dirigeantes, écarter du pouvoir les oligarchies traditionnelles, canaliser le mouvement des masses et faire pression sur l’impérialisme dominant.
II.4.2. La réforme éducative péruvienne
Au Pérou, la réforme de l’éducation s’insérait dans le cadre global d’un processus politico-social commencé depuis 1968. Le décret-loi d’application de la réforme, promulgué le 21 mars 1972, était le fruit d’un travail immense abattu par la Commission de Réforme de l’Education. Cette dernière avait reçu mission de redéfinir le concept d’éducation, les nouveaux rôles des agents de l’éducation, les fins et les objectifs de l’enseignement. Elle se devait aussi de proposer un nouveau système éducatif et de suggérer de nouvelles formes d’organisation et de participation de la communauté.
Les conclusions des travaux de cette commission donnèrent une place très importante à la décentralisation administrative, se concrétisant dans les centres ou noyaux éducatifs communaux. Car, « ces centres ou noyaux (nùcleos) constituent une unité communautaire autogestionnaire, base de tout le système de l’éducation nationale, dans lesquels se conjuguent les efforts de la communauté locale, des autorités de l’Etat, des parents et des éducateurs »[30]. Il était question de promouvoir une éducation de masses en en rapprochant les structures des administrés.
Tous les services communaux étaient incluent dans ces noyaux qui jouaient un rôle politique, économique et éducatif. En effet, la loi générale de la réforme préconisait une « véritable mobilisation de la communauté dans le processus d’auto-éducation libre et permanent, ce qui allège le poids jusqu’à maintenant mal et exclusivement supporté par l’école »[31]. Cette loi sonne comme un appel à venir au secours des structures conventionnelles de l’éducation, comme l’école, en promouvant l’éducation tous azimuts. Ainsi, la réforme éducative péruvienne porta de grands fruits quant au domaine de l’éducation non formelle.
II.4.3. La réforme éducative panaméenne
La réforme mise en marche au Panama, par le gouvernement du général Torrijos, était considérée comme un instrument de lutte pour le développement, l’indépendance et la décolonisation. Il visait une transformation économique et sociale du peuple panaméen.
Pour ce faire, la réforme éducative toucha jusqu’aux notions. C’est ainsi que d’école traditionnelle, on adopta la notion de « communauté-école ». Ceci permettait de promouvoir la dimension collective. Ce souci de collectivisation s’étendit aussi dans les domaines de la santé, des revenus, de l’habitation, de la morale, de l’effectif de la famille, etc. L’une des trouvailles de la réforme ainsi entreprise était celle des « écoles de production ». Il s’agit d’allier l’éducation au travail productif.
Ces écoles de production étaient de véritables centres éducatifs offrant une éducation basique. Cette dernière est une éducation « qui assure, par l’enseignement et le travail, la formation intellectuelle et manuelle »[32]. En cela, les écoles de production apparaissaient comme des noyaux de développement éducatif intégré. C’est autour de ces noyaux que les communautés se rassemblaient pour trouver des solutions à leurs problèmes. En 1977, il en existait 110 au Panama autour desquels gravitaient 1103 écoles satellites que fréquentaient 47621 élèves. Il y avait une coordination entre ces écoles de production, la structure du pouvoir populaire et les autres institutions étatiques.
II.5. La militarisation de la société civile et ses conséquences sur l’éducation
II.5.1. L’échec des nationalismes populaires
Dans le conflit d’intérêts entre le capitalisme impérialiste et le souci du développement animant les peuples, l’armée est apparue comme :
L’unique instrument viable pour discipliner les facteurs de production, assurer le processus d’accumulation affecté par les crises nationales dans le contexte de la crise internationale ; pour obtenir le minimum de consensus entre les différentes fractions des classes dominantes ; pour réprimer le mouvement des masses et anéantir les pratiques idéologiques et politiques révolutionnaires qui commencent à avoir un sens pour des groupes sociaux plus grands après l’échec des expériences « nationalistes populaires » et « développementistes modernisantes » [33].
En effet, le capitalisme monopoliste aidé par la conjoncture internationale a sonné le glas du modèle de développement participatif amorcé en Amérique latine. La nouvelle stratégie impérialiste a suscité une rivalité entre les classes dirigeantes qui voulaient désormais accumuler des richesses personnelles. Ceci a donné lieu à l’abandon du modèle économique socialisant et l’adoption d’une politique capitaliste, avec la monopolisation des secteurs dynamiques de la structure de production et l’aliénation des Etats aux multinationales. Dès lors, la population est sacrifiée à 75 %. En moins d’une année, les salaires des travailleurs sont réduits à moins de la moitié de leur valeur réelle, les classes sociales sont modifiées en profondeur, avec des disparités économiques et sociales criardes.
Les forces armées se proposent donc de transformer aussi bien la société politique que la société civile, mais aussi l’infrastructure économique. Toutefois, le souci de l’armée était, lui aussi, d’encourager et soutenir « le libéralisme économique le plus extrême et compléter le processus de dénationalisation de l’économie »[34].
II.5.2. Conséquence de la militarisation sur l’éducation
L’idéologie fondant l’action économico-sociale des militaires était « centrée sur le concept de la sécurité nationale et de la lutte contre le communisme international »[35]. Celle-ci les poussa à réorganiser la société civile en mettant sous leur contrôle tout le système scolaire et culturel, les médias et les instituts de recherche. C’est ainsi qu’ils espéraient, non seulement contrôler l’activité intellectuelle du peuple, mais aussi diffuser leur idéologie.
Les régimes militaires ont donc pris en otage les systèmes éducatifs de leurs pays. L’idéologie leur suggérait la suppression de certaines options académiques jugées subversives. Ils sont allés jusqu’à interdire l’étude de certains textes et de certains auteurs. Ils obligeaient les enseignants à s’autocensurer. Certaines méthodes didactiques ou scientifiques étaient proscrites.
Cette action a eu pour conséquence une baisse de la qualité de l’éducation offerte aux masses. Ceci s’est surtout observé dans les zones rurales où le taux d’analphabétisme et de désertion scolaire étaient très élevés[36]. Des pays comme l’Argentine, le Chili ou l’Uruguay, qui avaient jadis atteint un haut niveau du développement éducatif, ont vu celui-ci s’écrouler lamentablement. Le processus éducatif y régressait inexorablement. Comme pour parachever leur dirigisme très contraignant vis-à-vis de l’éducation, les militaires, sans tenir compte du coût élevé de la vie, n’ont pas hésité à réduire sensiblement le salaire des enseignants. En plus, ils ont enlevé toute liberté d’action aux syndicats et associations professionnelles des éducateurs.
C’est ainsi que l’enseignement s’est vu amputé d’un grand nombre de ses professionnels. En effet, beaucoup d’éducateurs ont déserté le système, d’autres ont été révoqués, d’autres ont été incarcérés, d’autres encore ont disparu quand ils n’étaient pas tout simplement assassinés.
La situation dans l’enseignement supérieur était encore plus critique. Les gouvernements militaires ont pris des mesures restreignant l’entrée des étudiants à l’université. Il voulait la ramener à une université oligarchique, comme ce fut le cas avant la réforme de 1918, en la faisant passer pour une université d’élites. Pour ce faire, ils ont aboli la liberté académique. L’autonomie universitaire ainsi que toute possibilité de participation estudiantine à la gestion universitaire ont été supprimées. En outre, beaucoup de spécialisations en sciences humaines ont été éliminées parce que jugées dangereuses et subversives. Pour donner le coup de grâce à cet ordre d’enseignement, le niveau du corps enseignant a chuté notablement.
CONCLUSION
Nous nous sommes refusé, au cours de ce travail, de tomber dans le triomphalisme ou le négativisme résultant des controverses relatives au jugement de valeur sur l’œuvre civilisatrice de l’Espagne. Tout simplement nous avons voulu retracer l’histoire de l’éducation dans ce sous-continent.
Il en ressort, au terme, que dans les débuts, le but premier de l’éducation en Amérique latine était l’évangélisation des colons. Elle consistait à les instruire dans la foi chrétienne. Cela était l’œuvre des religieux franciscains, dominicains, augustins, betlemites et jésuites. Mais parallèlement à cette finalité, ils ont commencé à donner des enseignements élémentaires et des rudiments professionnels aux indigènes. Ces enseignements allaient de pair avec la catéchèse. Progressivement, des écoles primaires se sot développées, de nombreux collèges ont été créés, des universités sont nées. Tout cela a permis un haut degré de culture en Amérique latine au XVIème siècle.
Du XVIIème au XVIIIème siècle, la plupart des intellectuels espagnols étaient de grands pédagogues et des hommes politiques. Ils entreprirent d’élaborer une pédagogie rationnelle visant à configurer la société à la pensée philosophique. Ceci influencera les hommes politiques latino-américains, qui voudront le mettre en pratique après les indépendances. La plupart d’entre eux tenteront des réformes incluant le système éducatif, dans le but de conformer les sociétés à leurs idéologies.
C’est ainsi que l’oligarchie terrienne et marchande, vainqueur des guerres civiles déclenchées après les indépendances, adoptera l’idéologie libérale. Elle visait l’« européanisation » de la société. Cela devait passer par « l’ordre politique » et la « liberté économique ». Ainsi, le but de l’éducation était, non seulement de rechercher le consensus et le consentement de certaines classes subalternes, mais également d’élaborer des théories hégémoniques aidant les classes dirigeantes à mieux écraser les masses paysannes. Ainsi, l’école était un appareil étatique et idéologique.
Cette double vocation de l’école a perduré sous tous les régimes qui ont conduit aux destinées de l’Amérique latine par la suite. Les régimes populistes en ont fait une action sociale parfaitement intégrée aux politiques sociales des gouvernements. C’est ainsi que beaucoup d’éducateurs prirent part aux luttes politiques et économiques en se constituant leaders syndicaux.
Les statistiques élogieuses du régime cubain, par rapport à l’éducation, ont fait dire à Fidel Castro que quatre siècles et demi d’ignorance s’étaient écroulés. Les cubains ont réussi à combiner travail productif et école. Ceci sera repris par les réformismes militaires.
Quels qu’ont été les régimes en place en Amérique latine, tous ont voulu assujettir l’école. Loin de lui permettre d’être un lieu de création et de transmission d’un savoir libérateur, ils en ont fait un moule pour la fabrication de la main d’œuvre et des militants politiques. Mais, parce qu’on ne peut pas comprimer les esprits, des hommes se sont toujours lever pour dénoncer ces injustices.
Bibliographie
GALINO A. et BERRIO J. R., « L’éducation en Espagne et en Amérique latine » in MIALARET G. et VIAL J. (sous la dir.), Histoire mondiale de l’Education, Tome II, De 1515 à 1815, Paris, PUF, 1981, pp. 123-145.
MARQUEZ A. D. et SOBRINO E., « L’évolution des conceptions et des réalisations pédagogiques en Amérique latine » in MIALARET G. et VIAL J. (sous la dir.), Histoire Mondiale de l’Education, TomeIV, De 1945 à nos jours, Paris, PUF, 1981, pp. 37-56.
[1] A. GALINO et J. R. BERRIO, « L’éducation en Espagne et en Amérique latine » in G. MIALARET et J. VIAL, Histoire Mondiale de l’Education, Tome II, De 1515 à 1815, Paris, PUF, 1981, p. 132.
[2]Idem, p. 133.
[3] Ibid., p. 134.
[4] Ibid., p. 137.
[5] Ibid.
[6] Ibid., p. 138.
[7] Ibid.
[8] Ibid., p. 139.
[9] Ibid.
[10]Cf., A. D. MARQUEZ et E. SOBRINO, « L’évolution des conceptions et des réalisations pédagogiques en Amérique latine » in G. MIALARET et J. VIAL (sous la dir.), Histoire Mondiale de l’Education, Tome IV, De 1915 à nos jours, Paris, PUF, 1981, p. 38.
[11] Idem.
[12] Ibid., p.39.
[13] Ibid.
[14] Ces mouvements civilistes revendicatifs au Brésil sont connus sous l’appellation de tenentisme, radicalisme en Argentine et battlisme en Uruguay.
[15]Ibid., p. 40.
[16] Ibid., pp. 42-43.
[17]Ibid., p. 41.
[18] Cf., Idem, p. 45.
[19] Ibid., p. 45.
[20] Ibid.
[21] Cf., Ibid., p.46.
[22] Ibid., p.47.
[23] Cf., Ibid.
[24] Ibid.
[25] Ibid.
[26] Cf., Ibid., p. 49.
[27] Ibid.
[28] Cf., Ibid.
[29] Ibid.; p. 52.
[30] Ibid., p. 53.
[31]Ibid.
[32] Ibid.
[33] Idem. p. 54.
[34] Ibid.
[35] Ibid., p. 55.
[36] Cf., Ibid.

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