domingo, 3 de enero de 2010

I. COMMENT PARLER DE DIEU AVEC LE PSEUDO-DENYS ?

I. COMMENT PARLER DE DIEU AVEC LE PSEUDO-DENYS ?

1) Denys ou Pseudo-Denys l’aréopagite : existence énigmatique et œuvre

Denys ou pseudo-Denys l’aréopagite reste une énigme historique dans la mesure ou son identification, au-delà de la pertinence de sa pensée conduit l’historiographe dans un labyrinthe. C’est un labyrinthe à deux visages :
Le premier est celui du personnage converti après la prédication de saint Paul à l’aréopage (ac.22, 16-34). Selon René Roques dans le dictionnaire de théologie chrétienne, « la passio sanctissimi dionysii d’hilduin (patrologie latine CVI, 23-50) accrédita pour de long siècles la légende de son apostolicité et en fit même le premier évêque d’Athènes et le évêque martyr de paris »[1]nous nous situons alors à ce niveau au premier siècle de notre ère.
Cependant, l’influence du néoplatonisme dans sa pensée, notamment celle de Proclus élimine cette possibilité quand on sait que Plotin lui-même se situe au troisième siècle. Tout compte fait, le deuxième personnage se situe entre le V et le VIè siècle selon René Roques. Tour à tour, on a tenté de l’identifier à Denys d’Alexandrie, Basile de Césarée, Ammonius sakkas, Etienne barsudaïli, Sévère d’Antioche, Pierre le foulon. De façon générale, aucun de ces rapprochements n’identifie avec certitude ce dernier. De lui nous gardons comme œuvre le corpus dionysien qui comprend dix lettres et quatre traités :les noms divins, la théologie mystique, la hiérarchie céleste, la hiérarchie ecclésiastiques. La pensée contenu dans ces écrits a grandement influencé la pensée spirituelle du moyen âge : Hugues de saint Victor, Albert le grand, Thomas d’Aquin l’ont beaucoup cité. Qu’en n’est-il du contexte d’émergence de sa pensée ?

2) Contexte d’émergence de sa pensée

Lorsque les pères de l’Eglise commence à formuler la doctrine de la foi issue du message évangélique enseigné par les apôtres, ils se situent « dans univers marqué par l’organisation romaine, l’esprit grec et la religiosité orientale »[2]Les pères, pour la plupart, convertis à l’âge adulte, étaient bien imprégnés de philosophie et de christianisme, tel sera le cas de Justin qui, en plus, métrisait la langue grecque et latine. C’est lui qui, le premier et de manière apologétique tente de concilier platonisme et christianisme. A sa suite, Denys qui nous intéresse particulièrement « représente une des tentatives pour réconcilier le message évangélique et la tradition néoplatonicienne, tentative séduisante pour une Eglise jeune encore qui n’a guère cessé de platoniser tout en se méfiant de Platon »[3]
L’un des problèmes qui préoccupe les pères est celui de la modalité avec laquelle l’on peut parler de Dieu et de sa relation avec les créatures. Notons déjà avec Meyendorff que « dans la patristique grecque avant Denys, le problème de la connaissance de dieu fut dominé par la polémique contre un extrémisme arien du IVè siècle…selon Eunome, l’essence divine (identifié par le père seul l’inengendré) était accessibles à l’intelligence humaine : l’homme pouvait connaître dieu comme Dieu se connaît lui-même »[4]Denys ne partagera pas cet avis.

II LES TROIS VOIES A TRAVERS LESQUELLES L’ON PEUT NOMMER DIEU

D’entrée de jeu, précisons que quelque soit la voie employer, c’est de l’écriture que Denys tire son raisonnement. Il avertit au prêtre Timothée à qui il destine son enseignement en ces termes : « s’il existe un homme, en effet, qui soit totalement rebelle à l’enseignement des écritures, un tel homme sera parfaitement étranger à notre façon de philosopher »[5]c’est dans ce sens que nous pouvons comprendre la référence qu’il fait régulièrement à l’écriture sainte.
1) La voie de la causalité
C’est elle qui indique que dieu le principe la cause et la fin de tous les être ; et, à travers ces êtres, on remonte à dieu qui est leur créateur. Ceci non par le fait de l’intelligence naturelle, ni par le fait d’un dépouillement du corps à fin de permettre à l’âme de pourvoir monter jusqu’à lui, mais simplement parce qu’il est le Bien en soi. Or le bien soi comme le dit Denys « ne demeure pas totalement incommunicable à tous les êtres, car de sa propre initiative et comme il convient à sa bonté il manifeste continument ce rayonnement suressentiel qui demeure en lui, en illuminant chaque créature proportionnellement à ses puissances réceptives »[6].
En tant que cause de toute êtres, il est aussi célébré comme providence, de sorte qu’il est inscrit dans tous les êtres le désir de retourner chez leur créateur : les êtres intelligents par le désir amoureux ou extatique ou encore désir de charité qui mène à l’union mystique. Denys citera même cette belle phrase de saint Paul, « ce n’est plus moi qui vit, c’est le christ qui vit en moi »[7]
En ce qui concerne les autres, la modalité est différente ; elle se base sur l’imperfection de ses êtres que le Bien unit en lui tout en les perfectionnant. Parlant justement des biens faits du Bien en tout êtres il dira :
« Et de même que la bonté convertit toute choses à elle-même, de même qu’en tant que déité fondatrice elle est principe de rassemblement pour tout ce qui est dispersé, en sorte que tout vers elle comme vers principe, son centre de cohésion »[8]Ce nom divin qui est le bien est selon Denys ce que « les saints théologiens célèbrent aussi en l’appelant beau, beauté, amour, aimable et tous les autres noms divins convenant à cette fraicheur qui est source de beauté et pleine de grâce »[9]ainsi donc, la causalité nous fais voir la relation entre le Bien et tout ce qu’il meut « en tant qu’il est ce que tous désirs » et qu’il est tout en tous (eph.1,21)
2) La voie négative
La voie négative est celle qu’utilise la théologie dite apophantique. Elle affirme en effet qu’on ne peut pas connaitre l’essence divine, ni dire ce que Dieu est, mais seulement ce qu’il n’est pas. Il ne s’agit pas d’un nihilisme, ni d’une démonstration d’imperfections en dieu. Pour le pseudo-Denys, parler de Dieu par cette voie c’est utiliser les noms divins qui révèlent dieu non pas au sens privatif, mais plutôt au sens transcendant ; il s’agit de nier en Dieu toutes les imperfections humaines pour se situer bien au-delà du résultat obtenu dans la mesure où dieu transcende toute les catégories humaines.
La privation implique un manque, une faiblesse, un mal et « le mal un affaiblissement et une défaillance du bien »[10]or Dieu qui est le bien en soi ne connait point de défaillance, d’imperfection. Ainsi donc on peut mieux comprendre Denys lorsqu’il affirme : « En réalité, comme je l’ai souvent répété, il faut entendre les attributs divins selon un mode qui convienne à Dieu. quand on parle de son inintelligence et de son insensibilité, il faut entendre cette négation dans un sens transcendant, non dans un sens privatif »[11]Dieu est par ailleurs ineffable, inconcevable, incommensurable ineffable, infigurable, indivisible, inconnaissable…en fait, la liste plus longue puisque Denys affirme qu’ « il faudra pousser l’audace jusqu’à affirmer que le non-être participe lui aussi au même Beau-et-Bien, car c’est une chose belle et bonne que de célébrer en dieu par la négation de tout attributs »[12]
3) La voie de l’éminence
Cette voie est « celle qui consiste à dire positivement telle ou telle chose de Dieu, mais en soulignant que cela se réalise de manière éminente »[13]Denys la présente en une phrase qui selon nous résume sa pensée à ce sujet :
« Pour qui sait les entendre selon le mode que convient à dieu, toutes ces expressions signifient que, de quelque façon qu’on puisse le connaître, il existe de façon suressentielle…il est toutes choses, étant cause universelle ; il contient synthétiquement et primitivement en lui tous les principes et toutes les fins transcendant à tout être, en tant qu’il préexiste à tout, suressentiellement et de façon éminente »[14]
L’éminence est le fait que Dieu se trouve en tout et nul part et surtout préexiste avant toute chose.
Notons avec notre auteur certains nom manifestant l’éminence de dieu : « certains noms conviennent donc en commun à l’entière déité, nos esquisses théologiques l’on démontré abondamment à la lumière des écritures. C’est ainsi qu’on peut la nommer toute entière plus que bonne, plus que dieu, suressentielle, plus que vivant, plus que sage »[15]
En fait, tous les noms positifs selon Denys sont à considérer de façon éminente et transcendante car ils se situent au-delà des catégories d’Aristote, voilà pourquoi il affirme que : « la manière de connaître dieu qui est la plus digne de lui c’est de la connaître par mode d’inconnaissance, dans une union qui dépasse toute intelligence »[16]Ainsi donc, dieu est imminent et transcendant à toute chose. Chaque fois que Denys emploie cette voie, la formule est la suivante ; un attribut positif au superlatif au-delà duquel il invite Timothée à mouvoir sa pieuse contemplation.

MUNYANZIZA Pierre Célestin
Missionnaires des Sacrés Cœurs
de Jésus et de Marie
Emails :
cepimsscc@yahoo.fr
cepimsscc@hotmail.com
Site internet :
http://munyanziza.blogspot.com/

[1] René Roques, in dictionnaire de la théologie chrétienne, Encyclopedia Universalis et Albin Michel, Paris, 1998, p252.
[2] Jacques Liébeart, les pères de l’Eglise I-IV siècle vol. I., Paris, Desclé, 1986, p.,13.
[3] René Roque in Dictionnaire de la théologie chrétienne, op., cit. p.13.
[4] Meyendorff,Le christ dans la théologie bysantine, paris, éditions du cerf,p.124.
[5]Ibid., p. 69.
[6]Ibid.,PP. 75-76.
[7]Gal, 2, 20.
[8] Ibid.,p 98.
[9]Ibid., p.100.
[10]Ibid.,p.124.
[11]Ibid.,p .43.
[12]Ibid., p 101.
[13] Thomas Joachin, introduction à la théologie naturelle, Yaounde, Presses de L’ucac,1998,p.31.
[14] Pseudo-denys, noms divin, op., cit.p. 135
[15] Ibid.,p80.
[16] Ibid,, p 145.

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